lundi 31 décembre 2007

American Gangster

Un mot, ce soir, non pas pour résumer et remercier ou envoyer chier tous les acteurs et facteurs qui firent de 2007 une année qui pète ou une année qui fouette, mais pour Ridley Scott et tous ses autres petits camarades.


Au moins, ce petit mot me permettra d'échapper au bilan annuel de rigueur, et je m'en réjouis. Je n'aurais pas pu résumer cette année trop inégale.


Je viens de voir le dernier Ridley Scott, American Gangster. L'écrire me fend déjà l'arrière, et je me gausse ou je m'énerve d'avoir perdu au bas mot deux heures de ma vie. Un procès au cul pour chaque déception, et je serais riche comme Al Capone.


Avant, j'ai vu I'm Legend. Voilà donc les deux derniers films que j'aurais découvert cette année. Il fut un temps, c'était Amélie Poulain qui bouclait 2001. (J'opte souvent pour la prétention, ça doit être mon goût pour les choses précieuses et ridicules.) Will Smit m'a convaincue, car il m'a fait rire, sans le moindre soupçon, finalement, de prétention. Le titre était trompeur.


Quant à American Gangster...
Frank Lucas et Richie Roberts me font bien rire, je les connais depuis un bail. C'est comme une histoire d'amour, donc une dérive inconsciente puis consciente: au début, j'aime bien ce flic marginal et raillé, en marge de la société, cet espèce de baroudeur aux yeux qui tombent, ce type qui boude tout le temps. Au début, j'aime bien le gangster de Harlem qui ne jure que par les jupes de sa mère, offre des fourrures à deux jambes interminables (le rôle toujours sous-exploité et sous-estimé de la femme du ganster), et 'bute' ses Judas sans broncher, le regard fixe, dans lequel se lisent la mélancolie, la puissance, la rage, oh... la rage, et la solitude. Les premiers temps, j'apprécie les jeux de lumière que le réalisateur a pu choisir avec soin, j'admire l'idée du contrejour sur le méchant bandit et le rayon de soleil sur le flic, ou l'inverse.


Puis, peu à peu, je me lasse. Incapable de la trouver moi-même, je vais au cinéma, je regarde des films et j'attends l'idée neuve. L.A. Confidential et Jackie Brown étaient neufs il y a 10 ans, Malcolm X il y a 15 ans. American Ganster arrive après la bataille, braque la banque des idées neuves, ce salaud. C'est un vrai film de bandit, un film qui vole tout et partout sans complexe, un film avec mon procès au cul.


Bientôt, je me lancerai dans un poulet long comme les jambes de Miss Puerto Rico sur la dérive désespérante du cinéma hollywoodien. Dante aurait pu ajouter un cercle à l'Enfer.


N'en parlons plus.


Comme dit le Dr No, et ce sera là l'ultime grand mot d'esprit de l'année, "Finissons-en avec 007".




dimanche 30 décembre 2007

vendredi 28 décembre 2007

La Matinale




Guys, je baille, je renifle, j'éternue et un petit hoquet s'est même invité tout à l'heure. Mais il est trop tard pour dormir, alors je résiste devant mon écran réduit à sa plus faible luminosité.
Tant que vous êtes blottis dans vos sacs de couchage, que vous dormez du sommeil des justes, j'en profite pour voler la fin de la soirée et l'offrir à cet article pris sur-le-vif, sans le moindre soupçon de recul, ni de sommeil.

Alors, pour faire court:
Moi aussi j'aime Wax Tailor, et même si Klapisch nous le pique, il restera à nous. Jacques Brel, que nous aimerions tous voir en concert un jour; la dernière de Britney, le fan club de Britney; The Hidden Camera, Piaf, que j'aime assez finalement; la barbichette de Vincent Cassel, qui ma foi ne fit rire que moi; la lame de 25cm qui s'enfonce dans la chair de mon index, le sang; le vin, un bon Saint Emilion qui adoucit les papilles, puis une touche de Lambrusco pour faire pétiller les pupilles, et le grand final au champagne, il ne manquait plus qu'un maillot jaune; les crêpes souples et le cidre de Normandie au goût fin et complexe; la mousse au chocolat pâteuse, pas sucrée, mais le chocolat supporte bien des solitudes...; le chili con carne oublié dans le frigo; les clopes, les clopes, et étrangement malgré l'heure, pas un seul café.

Quelques souvenirs au passage, quelques madeleines d'ores et déjà moelleuses et encore chaudes...
Buenas!







dimanche 23 décembre 2007

Accusé réception levez-vous !

M.A.P.E.R.S.
Paris, le 21 décembre 2007,


Mademoiselle,


Nous avions convenu dans notre contrat conclu le 2 janvier 2007, que vous deviez procéder à l'accomplissement suffisant et nécessaire de vos efforts.

L'échéance était clairement mentionnée comme impérative.


Vous nous avez livré le premier lot de vos efforts, ainsi que l'atteste et le récépissé de la déclaration d'accomplissement pour ledit lot.


Nous nous permettons toutefois de vous rappeler que l'année en cours arrive à échéance. Il vous reste : une semaine et un jour, pour nous livrer les lots d'effort suffisants et nécessaires à la clôture de notre contrat.

Afin d'assurer le renouvellement de nos accords contractuels, les termes du contrat actuel nécessitent d'être respectés.

Dans un souci de clarté, et pour éviter tout malentendu, nous vous rappelons les termes dudit contrat ainsi que leurs annotations indicatives :


- Résolution 214520: démissionner de votre poste d'équipière polyvalente dans la restauration rapide. Accompli.
- Résolution 214521: échanger un minimum de 24 567 mots avec Mr F.E., votre père. Accompli.
- Résolution 214522: effectuer un maximum de 74 nuits sans sommeil sur un total de 364. Ajourné.
- Résolution 214523: obtenir le permis de conduire, avec obtention du code acceptée comme accomplissement de ladite résolution. Ajourné.
- Résolution 214524 et 214525, appartenant à un champs d'effort similaire: apprendre l'italien avec supplément de grade pour le napolitain – apprendre le piano avec annulation de l'intégralité des résolutions précédentes si niveau M2 atteint. Ajourné.
- Résolution 214525: obtenir une expérience égale ou supérieure à 2000 au jeu de Tennis proposé par la console japonaise Wii. Accompli.
- Résolution 214526: visionner l'intégralité des films réalisés par Mr Woody Allen avec lot nécessaire et suffisant comme suit: Annie Hall, Maudite Aphrodite, Everything you always wanted to konw about sex but afraid to ask, Everybody says I love you et Manhattan. Ajourné.

- Résolution 214527: non cessation d'accord avec S.A. Camel et renouvellement de consommation de tabac, avec respect des normes Ultralight avec filtre, avec annulation de ladite résolution si cas avéré de cancer ou grossesse. Accompli.

Dans l'attente de votre règlement,
Veuillez agréer, Mademoiselle, l'expression de nos meilleures salutations.

Le Ministère des Accomplissements Personnels, des Efforts, de la Récompense et de la Sanction

vendredi 21 décembre 2007

Foie gras de connard



« Nicomaque, ordonnez que cette sotte bravache

Vienne céans tâter du jonc de ma cravache.
Je fais voeu qu'à l'instant (et de tout coeur j'y songe)
Je le rendrai plus souple et plus doux qu'une éponge.
»

Plutarque,
Comment tirer profit de ses ennemis, p.99, note 79


jeudi 20 décembre 2007

A nervous romance


Pour me consoler, ce soir, j'ai regardé Annie Hall. Il traînait dans le coin depuis un siècle. Je ne sais pas si je vais mieux. A le réflexion, je ne sais pas si Woody Allen me soulage ou m'angoisse.
Je sais que c'est une perle, comme on n'en fait plus, comme Woody Allen n'en fait plus... Le temps de New York, des dialogues interminables, des uh et des y'know, la-di-da, la-di-da, la la...




Alvy Singer: [narrating] After that it got pretty late, and we both had to go, but it was great seeing Annie again. I... I realized what a terrific person she was, and... and how much fun it was just knowing her; and I... I, I thought of that old joke, y'know, the, this... this guy goes to a psychiatrist and says, "Doc, uh, my brother's crazy; he thinks he's a chicken." And, uh, the doctor says, "Well, why don't you turn him in?" The guy says, "I would, but I need the eggs." Well, I guess that's pretty much now how I feel about relationships; y'know, they're totally irrational, and crazy, and absurd, and... but, uh, I guess we keep goin' through it because, uh, most of us... need the eggs.

mardi 18 décembre 2007

Tonight's the night


Shakespeare était au fait des insultes et de leur bon usage. Peut-être que je vais réveiller les morts, après tout. Si je pouvais gueuler comme j'aimerais gueuler, les voisins seraient gênés, mais Bob se réveillerait, qui sait ?


Nous sommes à trois jours des vacances de Noël, et, surprise, le blocage de Censier vient d'être levé. Notre cher président précise que les interventions, donc interruptions intempestives, des étudiants grévistes seront autorisées durant les cours. Il précise que des journées seront banalisées afin de "discuter autour de la LRU".
Il ne précise évidemment pas les dates de ces journées. Il reste imprécis quant à la validation de notre semestre, quant au maintien de notre inter-semestre.

Précisément, voici ce qui me traversa l'esprit.
A tous les rascals qui peuplent cette catin de Paname, à tous les présidents et en dernier lieu, à la plus belle, à l'administration, j'adresse un grand merci, franc, sincère et précis, pour avoir été si scrupuleux du bon déroulement de ce semestre. Un grand merci pour sauver trois jours, ce qui, ma foi, entre dans la continuité de l'emmerdement maximum. Un grand merci, enfin, pour avoir joué avec brillo dans la cour des cons, s'être fait bouffer les couilles tour à tour, et avoir fait tant de fautes d'orthographe. C'était instructif.
A refaire au plus vite !

lundi 17 décembre 2007

Un petit garçon #2


De nos jours, dans nos contrées franciliennes, un petit garçon de cinq ans et demi :

"Dans les films, ils disent toujours l'amour est plus fort que tout (rire moqueur). L'amour, je sais même pas ce que c'est de toute façon."

mercredi 12 décembre 2007

Paris III brûle-t-il ?

Assez tergiversé, assez parloté. Il y a une seule et unique chose qui importe en ce moment. Comme d'habitude, ce n'est pas sur ce point que je m'attarde. Mais, face à la situation rocambolesque et inquiétante dans laquelle nous autres étudiants de Paris III nous trouvons, je ne veux plus bavasser de choses et d'autres en toute impunité.


Après huit assemblées générales, le blocage de Censier a été reconduit, et le centre est maintenant en fermeture administrative par décision de la Présidence. Je n'aurai eu au mois de novembre que trois cours tout court, et le mois de décembre s'annonce aussi désastreux. Il y a fort à parier que notre semestre sera invalidé, mais je ne voudrais pas lancer de pessimistes sentences, qui après tout restent pour le moment de l'ordre de la rumeur.


Jusqu'à maintenant, la situation, bien que critique, ne m'inquiétait pas plus que ça. J'ai travaillé d'arrache-pied, histoire de ne pas perdre pied. Ce boulot ne sera certainement pas noté, m'enfin, les neurones, ça ne s'achète pas et ça ne se note pas.


Je m'inquiète. Quand j'ai postulé pour Paris III après mon année de droit, je l'avais élue avec soin. Elle était celle qui enseignait la littérature sous un angle intéressant, celle qui proposait des études de littérature comparée et une licence d'anglais pour le même prix, soit un peu plus de travail mais rien de bien fou quand on a 20 berges. J'avais presque boudé Paris IV, la grande Sorbonne, l'unique, parce que trop classique et plausiblement dogmatique. C'était, je l'admets, un jugement à l'emporte-pièce, mais à l'époque, je pratiquais le préjugé avec beaucoup d'aisance et de plaisir. Toujours est-il que j'étais bien heureuse d'entrer dans l'arêne.


Première année, premier blocage. Le CPE venait de passer sous le manteau de l'article 49.3, celui de tous les maux et de toutes les dérives. Cette provocation Villepiniste a valu à Censier un blocage d'environ un mois, si mes souvenirs sont bons. Les cours étaient suspendus, et moi, j'avoue que je flânais sans savoir trop quoi faire, à part peut-être profiter du soleil et de l'insouciance du printemps. J'avais confiance, étrangement, en l'institution universitaire, pour qu'elle sache se retourner et prendre les décisions adéquates pour la poursuite/reprise du semestre.


Le blocage a cessé, je ne me souviens plus trop comment, certainement en assemblée générale. A l'époque, je vivais sur la planète littérature, et tout désordre estudiantin m'en touchait une sans faire grimacer l'autre. Je mens un peu, ou j'exagère, car je me souviens maintenant très bien d'une, voire plusieurs conversations houleuses avec mes camarades et amis étudiants. J'avais une position ferme et claire, j'étais contre cette loi discriminatoire et anti-constitutionnelle. Je ne pouvais pas accepter, comme pas mal d'autres esprits, que la tranche « moins de 26 ans » soit soumise à une réglementation particulière, ou du moins, que les entreprises et autres patrons puissent contourner des principes fondamentaux du droit du travail. Enfin, je ne vais pas revenir sur ce sujet. Il est trop loin, il est trop tard. Une fois Censier décoincé, les cours ont repris, sans aucun report des partiels. Il nous restait trois semaines, nous avons fait les trois semaines. Le programme, lui, a subit quelques tortures.


Concernant le blocage, je n'avais pas d'avis particulier, égoïstement persuadée que j'aurais de toute façon mon année, quelqu'en soit le moyen. J'étais prête à tout. Je bossais, aussi. Je passais trois soirs de la semaine la tête sur ma caisse à Rivoli, j'avais d'autres clients à fouetter, il faut croire.
J'ai décroché mon année avec mention, non sans déclarer la guerre à l'administration. Mais ça aussi, c'est trop loin et il est trop tard. Le blocage n'a pas joué en ma défaveur.


L'an dernier, en civilisation américaine, j'ai lutté, nous avons tous lutté. Il s'agissait là d'une matière sans grand relief, comprendre ici qu'il fallait seulement posséder une petite montagne de connaissances (type vosgiennes, rien de bien fou), que nous n'avions pas et que nous aurions dû avoir. Le contre-coup du blocage se faisait sentir. Nous avons dû rattraper le programme du semestre perdu, et de ce fait, aussi complexe et vaste soit-elle, parcourir l'histoire de la naissance des Etats-Unis d'Amérique. Nous avons sauvé les meubles, et les crédits, non sans mal.


Cette année, dès la rentrée, la pression était présente dans les couloirs de Paris III, et dans les cours, lorsqu'ils étaient interrompus par les étudiants qui deviendraient quelques semaines plus tard les « grands noms du mouvement ». Un sourire ou de l'inattention se dessinait sur les visages. Idem, j'avoue que je n'y croyais pas. Nous avions déjà tâté les conséquences d'un blocage, et n'étions de facto pas très chauds pour réitérer l'insouciance inconsciente de vacances anticipées ou allongées. D'autant plus que la LRU semblait poser moins de problème à une majorité d'étudiants.


Après tout, les présidentielles venaient d'avoir lieu. Nicolas Sarkozy l'avait emporté sans ambiguïté, et son gouvernement aurait toute la légitimité et la marge de manoeuvre que lui confère une démocratie. Je n'ai évidemment pas suivi le mouvement populaire du 5 mai dernier, car la droite ne m'attire pas le moins du monde et encore moins Mr Sarkozy ; de cette droite, j'en fais une caricature grossière dans mes rêves, celle des travers humains rendus recevables par la simple existence d'un parti politique ; de notre président, je ne fais aucune caricature, mais développe un avis personnel qui déplore ses faits et gestes, opportunistes, malins, sournois, trop aisés, sans le moindre soupçon de finesse, mais après tout, business is business. Je dresse ici un portrait mal taillé et peu fin, mais là n'est pas mon propos, et mes opinions politiques s'arrêteront là pour ce soir.


Toutefois, il reste sans conteste que cette majorité « historique » en faveur de Nicolas Sarkozy, n'est le résultat que d'une opinion. Il n'y a ici aucune autre justification, ni le risque d'un Le Pen au commandes de l'Etat, ni celui d'un Chirac à nouveau au pouvoir. Les alternatives étaient relativement molles, donc peu dangereuses. J'oserais avancer ainsi que ce vote s'est déroûlé en toute connaissance de cause, et s'il est une chose que je peux louer chez notre président, c'est son honnêteté brutale concernant ses projets de loi.


Nous savions que la LRU était en chantier. Le syndicat majoritaire des étudiants, l'UNEF, a négocié cet été dans le bureau de Mde Valérie Pécresse concernant cette loi, et en est ressorti. La loi a été discutée au préalable, et certains éléments jugés inacceptables ont été retirés. Et voilà que les facultés se bloquent et se déchaînent. Voilà que l'UNEF se rallie à leur cause !


Je ne prétends pas que les étudiants de Rennes, Nanterre, Tolbiac ou Censier sont de sombres crétins, je souligne mon incompréhension face à l'incohérence de la situation. Pourquoi cette réaction à rebours ? Pourquoi personne n'a protesté contre la LRU au mois d'août, si dangereuse, inacceptable, anti-démocratique soit-elle, si elle signe l'arrêt de mort de la recherche ? L'argument des vacances et de la pause estivale n'est pas recevable. Dans un tel état de rébellion, tout étudiant, chercheur, professeur ou universitaire aurait dû clâmer son opposition dès le début des négociations. L'argument d'une démédiatisation ne me convient pas non plus. Je trouverai un article du Monde qui évoque la rencontre entre l'UNEF et Valérie Pécresse. Alors quoi ? Pourquoi maintenant ? Une mobilisation nécessite du monde, mais ce monde ne se récupère pas dans la masse de l'université, il se récupère dans une manifestation, et si personne n'est là, l'accord est tacite, la majorité l'emporte, aussi silencieuse soit-elle. C'est la loi de l'opposition.


Cette loi, la fameuse LRU, ne me semble pas dénuée de sens. L'amalgame est facile, ces derniers temps. Je précise donc que trouvant cette loi non dénuée de sens, je n'affirme pas par la même mon accord de principe envers le gouvernement actuel. Si ce reproche m'était fait, j'aurais le sentiment d'appartenir à un nouvel axis of evil. Il s'agit d'un procès d'intention, donc je passe.

La LRU, en l'état, ne bénéficie pas d'une marge de manoeuvre considérable. Il ne s'agit que d'une réponse bien mince aux enjeux que pose actuellement l'université française. Elle se trouve dans un état déplorable, tant sur l'aspect financier qu'académique. Nous nous trouvons au 70ème rang, si je ne me trompe pas, du classement mondial des universités par l'Université de Shanghaï. C'est donc dire que la Sorbonne ne rayonne plus comme « naguère », ce temps reculé que je ne saurais situer.


C'est donc dire que nos grandes écoles sont bien plus compétitives et efficaces – et chères – que notre socle universitaire. Ces grandes écoles, Sciences Po, Polytechnique, HEC, bénéficient de financements privés, qui ne semblent pas signer leur arrêt de mort. L'université nécessite un financement massif, bien plus que ce que l'Etat ne pourra ni ne voudra jamais lui accorder. Dans le meilleur des cas, c'est une question de temps.


A cet argument, on me répond que les universités ne sont pas comme les grandes écoles, et que la recherche serait gravement menacée par des financements privés. Alors quoi ?! A cela, je réponds une seule et unique chose : si l'université ne peut supporter le financement privé, à quoi est-elle menée ? L'Etat ne peut pas subvenir à tous ses besoins, et ne le fera pas. Sauf gouvernement communiste et goulag pour patrons ce qui, en l'état actuel du PCF, me semble peu cohérent.


L'université court à sa perte en rejetant toute alternative de financement, car l'essentiel du problème reste l'argent, l'investissement, au-delà de l'image et de la réputation qui ne sont que les conséquences d'un bâtiment qui tient debout, de professeurs mieux payés, de chercheurs mieux accompagnés et d'étudiants mieux informés sur la réalité d'un engagement dans des études universitaires.


L'université court à sa perte depuis trente ans. Ne rien faire, abroger, c'est signer son arrêt de mort à plus ou moins courte échéance. Je pensais les étudiants plus téméraires et moins craintifs, je pensais que les étudiants faisaient des études dans le but de trouver un boulot, dans une perspective réaliste, sachant pertinemment qu'une majorité de diplômés termine dans le secteur privé. J'étais pragmatique, réaliste, pas utopiste et rêveuse pour un sou. Je le suis toujours. Dans la marche du monde, il n'est pas acceptable que l'université reste telle qu'elle est. Le monde change, l'économie change, les étudiants doivent changer. Quitte à être cynique, la bouffe et les patrons ne font pas le tri. Je pense qu'il est trop tard pour reculer ou rester en place, l'université brûle alors que le monde tourne, elle ne suit plus, les étudiants ne suivent plus, c'est un huis-clos qui se délabre.


Ecrire tout ça fait lourde peine au coeur.


mardi 11 décembre 2007

Paradoxe sur patte

La Damqui : Le bon sauvage ?
El Esag : Oui, ce qui est perdu depuis le début.
La Damqui : On ne peut pas le retrouver ?
El Esag : Non.
La Damqui : Pourtant, quand je vois cette peinture, je voudrais être un bon sauvage.
El Esag : Je vous l'ai dit, c'est perdu.
La Damqui : Je voudrais n'être ni bonne, ni mauvaise.
El Esag : Tout ça est terminé, mais trouvez le bon côté, vous êtes belle et vous pouvez vous faire une omelette.
La Damqui : Les oeufs m'écoeurent. Je ne suis pas satisfaite, j'aimerais tant être comme lui ! Son physique m'est ingrat, mais ce qu'il vit me fait envie.
El Esag : Vous êtes perdue. On aura pris de votre bel esprit pour constuire un beau visage. Voilà pourquoi vous ne serez jamais un bon sauvage.



Le coeur tendre mais l'oeil sévère,
les oreilles fines mais l'écoute incertaine,
l'allure stricte mais l'esprit lâche,
les idées précises mais l'avis mobile,
l'envie aux tripes mais la peur au ventre,
les mots mais pas les faits,
l'art mais pas la manière,
la finesse mais le pas lourd,
l'élégance mais les sales habitudes,
le parfum mais la clope,
le sommeil mais les cernes,
le petit nez mais une dent cassée,
les cheveux bruns mais la peau fine,
la peau blanche mais le cuir dur,
l'excuse mais la rancune,
la petite bouche mais la grande gueule,
le futur mais la mémoire,
le mensonge mais la conscience,
les rêves mais le matin,
les grands rêves mais les petits souvenirs,
les eaux de Narcisse mais la boue de Modestie,
les pensées mais les arrières-pensées,
les rencontres mais la paresse,
la tournure mais la gourmandise,
l'amour mais la luxure,
le succès mais l'orgueil,
la sagesse mais l'envie,
la patience mais la colère,
l'épargne mais l'avarice,
l'argent mais les caprices,
les autres mais moi.
Des mains de velour dans un gant de fer, du petit oiseau sur la branche à Margaret Thatcher.

La Damequi, El Esag. Well, nobody's perfect !

lundi 10 décembre 2007

Have yourself a merry little Kitschmas


Je passe du temps sur ce blog, j'ai de l'affection pour lui, pour ce qu'il me permet de faire. Il m'agace rarement, nous entretenons une relation à la fois professionnelle et amicale, une entente pleine de sentiments distingués, des efforts partagés, lui pour me servir, moi pour ne pas l'oublier.


J'ai toujours accordé de l'importance à la présence d'un sapin dans toutes mes maisons. Ici, pour quelques temps, on imaginera un chalet perdu dans les montagnes, aux fenêtres embuées. Quand on frottera sur les vitres, on verra tomber les flocons et le Père Noël torturant ses rênes pour le bien des enfants. A l'intérieur, la lumière sera chaude et douce, jaune voire orangée, presque sucrée et écoeurante. Les couleurs seront vives, du rouge, du vert, de l'or et de l'argent, des guirlandes et le fumet d'une bonne bouffe, la souplesse d'un bon pinard, l'odeur de la mer, l'odeur de l'amour, de la paix, du bonheur, du sourire, des dents blanches et des teints heureux, emmitouflés dans de gros cols roulés Irlandais, qu'on enlèverait après deux ou trois verres, les éclats gras du rire des grands, les stridences des petits, le chat qui tâte les boules du sapin discrètement, le chien qui joue en faisant sourire sa grande gueule, tout le monde qui parle, qui boit, qui mange, qui sent, tous les sens en éveil, tout le temps de l'année qui s'enfuit dans une poussière d'étoile artificielle, et une soirée dont l'invité principal, le Père Noël, aussi généreux, aussi gros, aussi gras et aussi fou qu'un oncle ou un parrain, sera la cerise rouge et juteuse sur le gâteau du soir.

Le Père Noël pourra déposer ses cadeaux ici-même dans la nuit du 24. Je ne serai pas dans le coin, je ne l'épierai pas, je promets. Je laisserai une clémentine bien fraîche, parce que sur le Web, la route est longue.

vendredi 7 décembre 2007

Eux, les happy few


Je viens de recevoir un mail rempli de petits tests ; le genre de mail que ma flemme fout dans la corbeille.
Mais celui-ci est plaisant, et les résultats désolants :

Je ne suis donc pas psychopathe. C'est l'histoire d'une jeune femme qui est aux funérailles de sa mère. Elle aperçoit par dessus le cerceuil un jeune homme, inconnu, qui lui semble fantastique, qui pourrait être l'homme de ses rêves. C'est le coup de foudre, elle tombe éperdument amoureuse. Quelques jours plus tard, elle tue sa soeur. Pourquoi ? J'ai imaginé que sa soeur était une trop sérieuse concurrente, ou pire, qu'elle le lui avait soufflé.
Un psychopathe, paraît-il, répond que cette jeune femme espérait que le jeune homme se pointerait de nouveau aux funérailles. (J'aurais juste dit que cet esprit est allé en prépa.)

Deuxio, je ne sais pas faire en même temps de petits cercles dans le sens des aiguilles d'une montre avec mon pied droit et dessiner le chiffre six avec mon doigt droit.

Troisio, après avoir calculé un certain nombre de petites additions, on me demande de penser rapidement à un outil et à une couleur, et, comme 98% de la populasse, je pense à un marteau rouge. Je fouette.

Et quatriémo, pas des moindres, ma "personnalité" se lit sur la manière dont j'ai dessiné ce cochon. Tout y est. A noter qu'il n'a pas d'oreille et une très grande queue tarabiscottée. C'est instructif.


Si je me perds à faire ces tests, je perds du temps, et j'apprends que je suis une nana ordinaire. Moi qui pensais être un génie.

jeudi 6 décembre 2007

Blogage

Il est trop tard pour que j'écrive quelque chose de constructif. D'un autre côté, je ne sais pas si j'ai jamais écrit quelque chose de constructif. Alors à la bonne heure, je pars pour quelques lignes.

Du noir de l'encre (du blanc dactylographié, disons), ... je ne sais plus ce que je voulais dire.

J'ai entendu des cris dans la rue, des cris qui ressemblaient à ceux d'un bébé, donc je me suis inquiétée un brin, préférant respecter la philosophie pascalienne et vérifier de mes propres yeux que ce n'était rien, juste au cas où. J'ai imaginé la scène, sordide, et j'ai levée le cul pour ouvrir les volets. Je suis allée voir. Je me serai levée pour rien, du moins pas pour sauver un petit lardon.

Et maintenant que je me rassieds sur mon siège, j'ai oublié ce que je voulais écrire, quelque chose dans le genre d'une métaphore, avec le noir de l'encre et la fatigue, une merde du genre, certainement.

Mais je dois avouer que ma surprise est grande. La fatigue altère mon enthousiasme, mais ces cris venaient en fait de... chats ! Des chats qui se torgnolent dans la nuit (j'ai envie de partir sur le fait qu'il sont certainement gris, mais pour une fois, je m'épargne cette peine), qui poussent des cris étranges, presque une plainte, qui m'a toujours alarmée et fendu le coeur, vas savoir.

Je suis heureuse de voir que les chats de Choiseul m'ont suivies jusqu'ici, ces petits compagnons si nobles et si cons.

mercredi 5 décembre 2007

1986-2002

De nos jours, dans nos contrées franciliennes, un petit garçon de cinq ans et demi :

"Papa, est-ce qu'on peut voir après l'espace ?"
"Quand on a grandi, il ne reste plus qu'à vieillir."
"Pourquoi Nicolas Sarkozy gagne toujours ?"

L'éveil de la conscience politico-philosophique se fait dès le plus jeune âge, avant d'être trop vieilli, de s'embourber dans une pâte nostalgique, qui ne donne plus que ça :
"Mystérieux jardin de ma lointaine enfance,
Royaume ensorcelé perdu dans la distance.",
ou "Quelle journée de merde !" N'est-ce pas ?

Bon, il écoute aussi sa musique en sautant partout durant son quart-d'heure américain (quart-d'heure qui s'étale de 8h à 18h, en moyenne).
Et dire que son Crazy Frog sera dans 10 ans comme mon Zouk Machine maintenant, ça me rajeunit pas. M'en vais pétrir ma pâte !





Livraison

p.13
" Tu l'as peut-être déjà feuilleté un moment en librairie. Ou tu n'as pas pu, parce qu'il était enveloppé dans sa coquille de cellophane ? Tu es dans l'autobus, debout parmi les gens, tenant la poignée d'une main, tandis que de l'autre tu essaies de défaire le paquet, un peu comme un singe, un singe qui veut éplucher une banane sans lâcher la branche où il est suspendu. Attention à tes coups de coude ; excuse-toi, au moins. "

p.22
" C'est ce que j'entends par "vouloir remonter le cours du temps" : je voudrais effacer les conséquences de certains événements, et restaurer une condition initiale. Mais chaque moment de ma vie apporte avec lui une accumulation de faits nouveaux, dont chacun apporte avec lui ses conséquences, de sorte que, plus je cherche à revenir au point de départ, au point zéro, plus je m'en éloigne : bien que tous mes actes tendent à effacer les conséquences de mes actes antérieurs et que même ils y parviennent de façon appréciable, au point de m'ouvrir l'espérance d'un prochain soulagement, je ne peux pas oublier que chacune de mes tentatives pour effacer des événements antérieurs provoque une pluie d'événements nouveaux qui rendent la situation encore plus compliquée qu'auparavant, événements qu'à leur tour je devrai essayer de faire disparaître. Bref, je dois calculer plus serré, de façon à concilier le plus grand nombre d'annulations possible avec le moins possible de nouvelles complications. "

Si par une nuit d'hiver un voyageur, Italo Calvino, éditions du Seuil, 1981

Et je n'en suis qu'au début...

lundi 3 décembre 2007

Pendant ce temps, à Paris


Advienne que pourra, disais-je. Ce matin, j'étais fraîche comme un gardon, malgré une nuit un peu courte. Tu n'es pas tout seul à avoir peu dormi. Je lis que tu as passé ton oral avec succès, je ne suis pas étonnée. Tu as ce don félin de retomber toujo
urs sur tes pattes, dans une farandole de belles cabrioles qui forment les traits de la réussite. Je suis heureuse pour toi. Tu tournes des pages, tu vises la lune, petite étoile, mais soyons modernes, tu décrocheras Mars.

J'étais donc en bonne forme. En buvant mon café, en fumant ma première, en écoutant Marvin Gaye, étrangement pour un matin, tout allait bien. Habituellement, quand je dis que tout allait bien, j'enchaîne sur de désastreuses aventures qui auront ruiné le reste du jour. Pas aujourd'hui. Je pourrais être au trente-sixième dessous. Mais je l'ai déjà connu. Quand bien même, mon valeureux pessimisme répondra qu'on peut toujours descendre d'un cran. Mais je n'ai pas été au trente-septième dessous.

Marvin Gaye fait office d'allumettes pour mes paupières fatiguées. Comme Rominet, j'étais aux aguets, en partant, prête à reprendre le chemin de la faculté. J'étais (une fois n'est pas coutume !) bien optimiste de penser que le blocage serait terminé. En arrivant, j'aperçois des tables renversées, que je connais maintenant par coeur, peut-être même mieux que mes déclinaisons d'allemand (certainement, en fait). Je sais que je n'aurai pas cours. Mais il faut que je rentre dans le saint des saints. Une fois encore, je tombe sur deux bloqueurs coquins, aussi craquants l'un que l'autre. Un peu jeunes, ils doivent être en première année pour oser perdre leur semestre.



Il fallait que je rentre. Depuis quelques jours, une liste est affichée au troisième étage. Sur cette liste, il pourrait y avoir mon nom. Je pourrais être sélectionnée pour partir en Californie l'an prochain. Je me suis défoncée à faire ce dossier, j'y ai mis du temps et une lourde louchée d'espoir. Arrivée devant le papier, il n'y a personne autour de moi. J'ai monté les escaliers quatre à quatre, j'ai hâter le pas. Et me voilà seule, devant une affiche sous verre. Il y a onze noms.

Je ne vois pas le mien. Comme tout un chacun, je tourne les yeux un instant, puis je regarde à nouveau, au cas où j'aurais raté une ligne. Je n'y suis toujours pas. Je ne sais pas quel miracle j'attends ; que mon long patronyme apparaisse, que la théorie du chaos se mette en branle pour satisfaire mes désirs. Rien. Je souris, je fais ce rictus là, celui de la déception légère mais profonde, celui de la mauvaise nouvelle que l'on apprend seul.

Je repars, le pas plus lent. Je descends les escaliers, trois étages, environ soixante marches qui me ramènent irrémédiablement au sol. Les deux croquants me lancent un « Alors ? », je renvoie un « Bah non... ». Ils sont désolés. Je sais. Si j'étais dans un film américain, je répondrais « Moi aussi ». Mais si j'étais dans un film américain, je pourrais voir se dessiner devant moi le visage californien. Ces traits que je m'étais esquintée à suivre, à deviner. « Old is beautiful », qu'ils disent. Je réponds jeunesse ennemie.

Je quitte le lieu des lieux, mais un instant, je m'arrête au coin d'une rue. Je déambule, je fais trois quatre cents pas, je ne dis rien, rue de la Clef, je fais mon petit deuil. Marvin Gaye résonne encore, pour peu, il serait devant moi, chanterait rien que pour ma peine, sourirait et je lui sourirais. Après avoir tourné sur place comme un lion dans sa cage, je reprends curieusement du poil de la bête, et je m'en vais, pour de bon, loin de ce lundi matin chagrin.

Je lis Italo Calvino, Si par une nuit d'hiver un voyageur. Je manque de rater ma station, je saute hors du métro, le sac ouvert, le livre ouvert, l'écharpe par terre. Il écrit si bien, sa page 22 me requinque.

En revenant, je trouve un mail de Paris III : « Malheureusement... blabla votre dossier... blabla nous conservons... blabla. » Vieux motard que jamais, les gars... J'apprends plus tard que la concurrence était rude, que les candidatures étaient toutes d'un « très bon niveau », blabla. J'attendrai des jours meilleurs. La Californie attendra des jours meilleurs !

Mon ego n'est pourtant pas trop secoué. Quelque chose a dû changer durant ces dernières années. Il y a quelques temps, j'aurais râlé, pesté, ragé, hainé puis pleuré. Aujourd'hui, mes algorithmes ont changé et semblent mieux calculés. Je me fais bouffer le foie avec le sourire... Peu importe les dérives, il faut garder la cap lunaire et rester au clair de la Terre.

Après Marvin Gaye, après Calvino, j'ai trouvé réconfort auprès d'une WiiMote. Expérience : 849. Attention mes gaillards... Je n'ai plus de foie, mais je tiens une sacrée volée !

dimanche 2 décembre 2007

Le sonnet du sommeil



Le mois de novembre fut rapidement plié. Après une semaine de vacances et trois semaines de blocage, j'ai l'impression que l'automne n'a pas vécu sa mort à fond.
Pour autant, je n'aurais pas laissé mes neurones
tomber comme les feuilles tombent d'un arbre. J'ai réfléchi, peut-être trop. J'ai bossé sec, anticipant la tempête des trois dernières semaines de cours à venir. J'ai pris le temps de m'embrouiller avec un professeur, nous avons eu le temps de nous réconcilier, j'ai péché quelques neurones au réveil et leur ai infligé de réfléchir sur le génocide et l'homme moderne, ils ont chauffé puis sont parvenus à me donner un petit quelque chose. J'ai passé le TOEFL, j'ai développé une haine pour l'effet Doppler, me faisant redécourvir à quel point la physique m'est étrangère. J'ai monté un dossier pour partir étudier à San Diego, Los Angeles ou San Francisco. Bref, en un mois, si je n'ai pas eu cours, j'ai tout fait pour dérober le feu. Au moins, j'ai répondu à 'juste fais le'. Advienne que pourra.
Ce matin, j'avais une phrase en tête. Ca m'arrive quelques fois d'avoir une chanson à l'esprit, mais rarement une phrase toute faite (sauf quand je me maquille). "Si j'avais su, je t'aurais écrit des lettres plus courtes."

Ce soir, je bénis sincèrement le concept du lit. Il s'agit bien de la plus belle trouvaille humaine. De bons draps bien repassés, frais et doux. La chaleur de la couette, le moelleux de l'oreiller, le noir profond des yeux fermés, l'horizon parfait, les images, le passé, le futur à perte de vue.
Je m'en vais profiter de ma dernière matinée noire de l'année, de ce dimanche matin déjà englouti dans mon lit. Que le café rattrape ma chute dans la tragédie du jour, et que mes pensées soient neuves...


jeudi 29 novembre 2007

Du doudou en tube

Il existe un film de catégorie B, où un jeune homme invente le Velcro silencieux. Il a beau sortir des jupes de sa mère, cette découverte vaut son pesant d'or et il roule et rit et dort dessus. Depuis, je cherche sans arrêt quelque chose à inventer, pour à mon tour devenir riche comme Crésus sur le simple socle d'un truc bien pensé. C'est humain ?


Finalement, le secret, c'est qu'il faut non pas chercher à inventer, car c'est trop compliqué pour un esprit si peu scientifique que le mien (je ne suis pas près de découvrir la théorie de tout en faisant du surf), mais chercher à améliorer un truc. Ca peut suffire à ouvrir avec insolence les portes de la gloire et de la tune. Mais je n'aime pas assez ni l'oseille, ni la science, pour passer mon temps à creuser le fond de ma cervelle, je n'ai pas ces talents. Alors, chercher une idée intéressante me sert à passer le temps. Quand je n'arrive pas à dormir, j'essaie d'imaginer ce fameux truc qui révolutionnerait le monde, et pof, je m'endors. J'ai bien rêvé de la télétransportation, qui serait la plus grande découverte de tous les temps, ou au moins du siècle, mais je laisse ça à la gente masculine (oui, je préfèrerais que ce soit un homme, m'étant promis d'embrasser et d'aimer cet individu savant à tout jamais).


En revanche, parlons un peu chiffon. Si l'hiver m'est agréable, il a tendance à devenir l'ennemi de mes mains. La peau fine de l'Italie du Nord, étrangement, supporte mal la rudesse du froid, ce tueur en série dont les doigts sont le péché mignon. Les mains sont comme les feuilles d'automne, ridées et non vieillies. Alors, on inventa la crème hydratante, qui sent bon. (J'embrasserais volontiers ceux ou celles qui ont concocté l'odeur de la Nivea, qu'ils sachent qu'il s'agit là d'une précieuse madeleine.)


Hélas, les recherches se concentrent sur la texture fine ou épaisse de la matière, sur la couleur ou sur l'odeur. Mais ce défi cosmétique est déjà relevé, c'est déjà parfait. J'ai donc une proposition d'amélioration, une alternative marketting, à moins que, comme souvent, elle n'existe déjà.


Je rêve d'une crème hydratante waterproof. Je deviendrais une consommatrice folle, régulière, dogmatique et passionnée : la cliente idéale. Parce qu'en hiver, les virus font leur ronde et les microbes s'installent confortablement. Il faut se laver les mains avant et après tout. Il faut remettre encore et encore de la crème, parce que tout disparaît dans les bulles de savon. En ce moment, mon terrible dilemme est le suivant : ne pas me laver les mains au risque de tomber malade, mais avec les paumes douces ; ou me laver les mains, ne pas tomber malade, mais avoir les doigts qui tombent, ou, autre solution, consommer un tube de crème par jour. C'est cornélien. J'en appelle plus particulièrement au laboratoire Blue Lagoon Iceland. Leur algae & mineral body lotion bat tous les records de texture et d'odeur : c'est la meilleure, le but ultime recherché partout par tous, celle qui laisse une sensation de douceur et de fraîcheur tout en enrôbant l'épiderme d'un film qui la chérie tendrement. Ils se sont particulièrement bien acharnés sur ces précieux détails.


Voilà la plus petite de mes aspirations, modeste... et introuvable. Garrett Lisi me dira peut-être qu'une crème hydratante, c'est grosso merdo de l'eau, donc c'est waterproof ? Trop compliqué. Je veux rien savoir. Je sais que mes mains sont tristes quand je les lave. Je veux une crème hydratante waterproof.


...Voilà pourquoi je n'inventerai jamais rien, pourquoi je ne serai jamais riche comme Crésus. Un esprit un tant soit peu scientifique, qui n'a même pas besoin de s'appeler Garrett Lisi, me rétorquera qu'une crème hydratante waterproof est une idée de merde, une invention qui fouette.


C'est chose faite, et je suis triste quand j'entends que la crème n'est de toute façon pas un baume, qu'elle pénètre dans la peau, que de toute façon, si elle était waterproof, je ne pourrais plus me laver les mains et qu'elles seraient dégueulasses et que je tomberais malade et que c'est pas possible et tout et tout. C'est triste. Faut révolutionner la peau. Ca ne s'appelle plus une amélioration. On aura découvert la télétransportation avant. J'irai de Pékin à Paris en trente secondes, avec ma crème hydratante pas waterproof.


mercredi 28 novembre 2007

Fiat veritas et pereat mundus ?

J'allume la radio. Désespérantes fréquences.
Le premier titre, soit il se fout de ma gueule, soit il se fout de ma gueule.

Dans les rédactions, on s'est attelé à chercher un ordre au bordel de l'info. Il y a sûrement tout et n'importe quoi, tous les jours. Il y a toujours le Darfour, l'Iran, l'Irak, les élections en Russie sous haute tension poutinesque, la Corée du Nord, la Serbie dans l'impasse avec les kosovars, Annapolis, etc. Il y a le choix. Parmi toutes ces options plutôt pertinentes, qui ont certainement dû faire couler l'encre de l'AFP aujourd'hui, la rédaction de l'info décide de commencer par un résultat footbalistique. J'ai failli mettre 'de mes deux', mais je ne voudrais pas verser dans une vulgarité malvenue étant donnée la nature inexistente 'de mes deux'. Ou comment mettre l'accent sur l'inutile.

Point de culpabilité, ce soir, à dire que j'ai mangé un gratin de chou-fleur avec un oeuf dur.


mardi 27 novembre 2007

Je dérouille


Ce n'est pas grave. Il y a pire que de ne pas savoir exprimer ce qui tracasse. Enfiler des chaussettes mouillées, c'est pire.


Mais il faut que je sorte un truc, un vomi de mots pour que mes boulons rouillés dérouillent. Sans eux, je raisonne mal, je pense mal, j'écris mal, je suis mal. Sans eux, je suis con.


Est-ce que ce qui est rouillé peut dérouiller ? Dites-moi, vous les chimistes. J'ai envie d'être arrogante, injuste, vulgaire comme une poissonnière, crier, brailler, gueuler, engueuler, bouder, pleurer, chialer, mordre. Faire quelques choses pour que quelque chose se passe.


Jeunesse se passe


Je m'énerve et j'insiste, même si je sais que j'ai tort. La conversation commence doucement, mais je sens déjà que tout m'agace et que les arguments sont piteux. La mauvaise foi devient mon fond de commerce, et j'y crois dur comme fer. Il faut que je lui fasse entendre raison, même si je n'ai pas raison. C'est une question d'orgueil, de jeunesse impétueuse. Je ne mets pas d'eau dans mon vin, j'y mettrais du sang s'il le fallait. La nouvelle guerre des mots me rend folle. Le ton monte. Après avoir exposé les points de vue, les avoir retournés, on se met à brailler, toujours les mêmes phrases. C'est pendant une heure la même ritournelle, qui paraît interminable tant je sais que je ne lâcherai pas le morceau. J'atteins le stade où je sais que je n'admettrai rien, et je resterai campée sur mes positions. C'est trop tard, nous ne sommes plus dans le débat, nous sommes dans la lutte. Au pire, je claquerai la porte. Crier me donne un sérieux mal de crâne. Enfin je claque la porte. Comme pour mes anciens ennemis, j'ai du respect pour ces moments-là et leur souhaite en fin de compte une mort sereine.


mardi 20 novembre 2007

Dirty old town

Ecoute-moi, petit. Il y a très longtemps, tu n'étais pas encore né et à peine dans les genoux de ton père, les restaurants étaient fumeurs. Beaucoup de gens clopaient dans la rue, dans les cafés, dans les discothèques.


C'était le temps de ma jeunesse, quand on sortait d'une boîte de nuit les yeux injectés du sang de la fumée, quand nos belles vestes en velours côtelés, qui étaient gravement in, puaient le tabac froid. Alors on disait qu'on avait passé une bonne soirée. On se séparait, on mettait toutes nos fringues à la machine et on fermait nos yeux rouges pendant plusieurs heures. Pour les fumeurs, c'était le bon vieux temps.


Quand on sortait dans la journée, surtout en plein hiver, on avait pour coutume de se réfugier dans un bistrot du quartier latin, rue Mouffetard ou avenue des Gobelins. On commandait des grands crèmes à la chaîne, et on grillait nos tiges consciencieusement, l'une après l'autre. Le serveur était inbuvable, nous jetait les cafés à la tronche, mais il ne disait rien pour la fumée, rien pour l'odeur, rien pour ses yeux rouges. C'était le service à la parisienne.


Quand on voulait fêter quelque chose, on allait se faire une bonne bouffe dans ces chaînes de restaurants que tu n'as jamais connus. On nous servait un verre, on allumait une cigarette. On mangeait la barbaque et les frites, on allumait une cigarette. On commandait les desserts, on allumait une cigarette. On buvait le café, avec parfois le petit Spéculos, on allumait une cigarette. On payait, et en guise de salutation, on quittait tout sourire notre cheminée de table. En sortant, surtout en plein hiver, on en rallumait une, et on se réchauffait le coeur avec, en regardant la fumée dense sortir de nos bouches toutes rondes.


Quand j'étais jeune, on me disait : « Ecoute-moi, petite. Il y a très longtemps, les cinémas et les avions étaient fumeurs. » Je répondais que ça devait être horrible. Toute cette fumée en l'air, toutes ces vies en l'air.


Je sais ce que je te dirai bientôt, et ce que tu me répondras.


From Crassula to Spatula


Lounging in the terrarium...
















dimanche 18 novembre 2007

Parking

Une montagne d'images pour une myriade de films, de musiques et d'acteurs, qui ont tous marqué les péages de mon enfance et ouvert les grands axes de mes rêves de gosse.
Si quelqu'un est capable de reconnaître tout, qu'il ne me contacte pas, car nous sommes voués à nous rencontrer et à nous aimer. (Si ce n'est déjà fait...)