mardi 27 février 2007

Delenda Carthago est

Lecteur, j'hésite. D'un côté, il y a ma télévision allumée, pleine de belles images et de belles personnes. De l'autre, il y a mon clavier, avec la promesse d'une introspection et d'un énième épanchement massif. En même temps, si je t'appelle au secours, c'est que ma décision est déjà prise.
En parlant d'épanchement, Dieu sait si c'était sombre, à l'intérieur, dans les vallons de mes tripes.
Depuis mon retour de Los Angeles, j'étais un peu comme Scrat, la petite bête préhistorique. Lecteur, tu te souviendras de lui comme une boule de poils marron, au nez long et aux yeux ostensiblement globuleux. Quand Scrat tombe d'une montagne, il se fait très mal, mais il survit. Car ce qui compte par dessus tout, ce sont les noisettes. A peine relevé et n'ayant rien appris de sa chute, il reprend sa conne de course.
Lecteur, tu me croiras ou non - hélas, je pourrais bien te raconter mon mariage ou les accouchements de mes frères avec autant de sincérité –, depuis le 12 janvier, ou peut-être depuis le début de l'année, j'ai flotté. J'étais bercée ou blessée par des embardées fantasmagoriques, bien loin des bas-fonds de ce monde. J'ai été rapidement, et c'est bien normal, atteinte du mal de flottaison excessive. Car ô douleur, je me suis rendu compte, mon bon lecteur, que je ne naviguais pas sur un long fleuve tranquille, malgré, je te l'accorde, la douceur du navire (une sorte de berceau aux draps doux et frais, et blancs).
Après avoir creusé des puits de désespoir ; après avoir constaté qu'à force de m'écouter, je risquais fort de devenir sourde, j'ai décidé de faire une sorte d'opération à mémoire ouverte. Parce que, quand cette fameuse vie me tue dans ses fameuses heures perdues, lorsque je n'ai pas un morceau de ciel à me mettre sous la dent, ni le vent à croquer, ni l'eau à respirer, ma mémoire devient l'ennemi. Mauvaise conscience et bonne mémoire font bien mauvais ménage.
Flotter pendant toute ma chienne de vie ne m'avancera à rien, et me fera même reculer. Maintenant, il faut que je nage. Alors bien sûr, comme toi gamin, lecteur, j'ai peur de l'eau, j'ai peur de me noyer et de couler comme un gros boulet. J'ajouterai donc à ma brasse un soupçon de légèreté, du courage et des dents toujours bien aiguisées, parce qu’on ne se refait jamais complètement.
Si tu te sens perdu, lecteur, vas, ce n'est pas une affaire d'état. Enfin, c'est une affaire d'état de mes entrailles, que j'essaie tant bien que mal de te figurer par quelques vains mots, alors qu'entre nous, un bon steak saignant ferait l'affaire.

vendredi 9 février 2007

Grosse bouse. - Non ! Grosse bise.

Parce que ça faisait bien longtemps que je ne m'étais pas trouvée seule dans mon appartement, que depuis bien longtemps, lorsque j'avais du temps libre, je fuyais la grande ville, j'en profite pour écrire une missive, parce que ça faisait bien longtemps que je n'avais pas eu le temps.
Et puis, cette semaine s'est chaque jour dessinée sous de nouveaux auspices. Je ne dirais pas qu'ils étaient bons, mais la nouveauté possède toujours ce petit quelque chose d'excitant. J'ai récupéré une chemise flambant neuve, sans tâche, sans trou, et d'une couleur définie, non plus grisonnante et moche. Je l'ai repassée avec plaisir, comme quoi, tout cela ne tient pas à grand chose. Autre nouvelle qui fera le bonheur de beaucoup, je suis entrée en possession d'une carte Booster, qui, grosso merdo, s'avère être le seul avantage de bosser pour Ronald. Ainsi, nous pourrons nous faire péter la panse en malbouffe plutôt bonne, quand même, tout en ne déversant que quelques malheureux pécules. Je me suis rendue à Rivoli sous un nouveau jour, mercredi, et je dois dire que le succès fut au rendez-vous. Comme quoi la moindre métamorphose suffit à rendre le monde fou. Je remercie parfois le manque de temps, car il me fait faire des folies que jamais je n'aurais envisagées. Un mercredi qui, une fois n'est pas coutume, fut un grand jour, donc.
Il le fallait, car le début de semaine n'avait pas été glorieux. Il s'était fourré dans une zone de turbulences, et sans crier gare, le moral s'était vu transporté à dix mille pieds sous terre. Encore une chose nouvelle, celle de pouvoir naviguer au 36è dessous. Je n'avais pas encore trouver l'occasion de verser les larmes de la nouvelle année. C'est donc chose faite, et ce fut autant épuisant qu'appréciable. Après une bonne bassine d'eau salée, je m'endors comme un bébé et tombe dans le sommeil des justes. Jusqu'au lendemain, où,
matin oblige, je vis ma tragédie quotidienne. L'enfer, c'est sortir de ses draps.
Les bonnes résolutions ayant été longuement mûries, je m'évertue à m'y tenir. Par exemple, la plus juste et la plus noble de toutes était celle de donner à manger et à fumer chaque mercredi soir à ce vagabond qui dort dans des cartons, avec qui les bavettes sont réduites mais toujours sympathiques. Hélas, mon beau cheval blanc n'aura que peu servi, car cet homme noirci de crasse refuse obstinément mes offrandes. Il me dit sans cesse qu'il a déjà le ventre plein. A la bonne heure. Je repars tous les mercredis soi
rs avec cet excès de bouffe dans mon sac, sans savoir à qui le donner, puisque moi aussi, j'ai le ventre plein. Comme lorsque j'éteins lumières et ordinateur. Il ne me reste que quatre malheureuses bougies pour m'éclairer durant ces 5 minutes "pour la planète", ce jeudi 1er février dernier. Je m'aperçois que l'immense immeuble du Crédit Lyonnais n'a absolument rien éteint, ni les bureaux, ni l'open space, ni les spots. A quoi bon, me dira-t-on ? Je ferme toujours le robinet en me brossant les dents, car non, je ne perds pas espoir de devenir une bonne "citoyenne du monde".

Quant à ma citoyenneté pure, si j'ose dire, elle subit les aléas de son temps. Elle observe les vagues, qui vont, qui viennent, en faveur de Sarkozy un jour, de Le Pen l'autre jour, de Ségolène quelques fois. Trop de mollitude, face à trop de duritude. Ma citoyenneté sait sans nul doute à qui elle offrira sa voix, mais doute autant du succès de Ségo que de l'existence du paradis et de l'enfer. J'espère donc avec un grand E, car en somme, c'est tout ce qu’il me reste à faire. Aurais-tu le courage d'attendre un petit mois avant tes 21 ans, et en ce 5 mars, de commencer à récolter une 500taine de grifouillades pour devenir "l'alternative" dans 5 ans ? Non. Quoique, quand les oreilles ont soif, on peut leur donner n'importe quel breuvage, même de la bibine.
Tiens, un autre et dernier détail que j'avais oublié de mentionner plus bas : le son de 2006, celui qui a envahit mes petites oreilles d'elfe, c’est Crazy. Le film qui a payé son émotion suprême, c'est Two for the Road. Un autre film à retenir, self explanatory, c'est Borat. Le livre qui a transformé mon ennui, c'est Les Bienveillantes. Le lieu qui a mis de la magie dans mon petit coeur flétri, c'est La Cotinière. Et le reste, le reste viendra plus tard. Tout ce qui manque est toujours en retard, car tout ce qui manque n’est pas ponctuel, mais tout finit par arriver.