mercredi 18 avril 2007

C'est le bordel, chez vous aussi ?

Je ne sais pas si c'est le sort du retour qui s'abat sur moi, mais je suis un brin haineuse, ce soir. Contre la Sncf, qui me fait raquer des sommes pas possibles et me met des heures de retard dans la vue, pour des raisons X ou Y qu'il me chaut peu de connaître. Contre ma voisine de train, qui m'avait volé ma place fenêtre, et dont la sympathie est à travailler. Contre les transports qui s'arrêtent à 1h00, pas plus, abandonnant tous les voyageurs en quête de compagnie.
Je suis triste et mélancolique, aussi, comme d'habitude. De toute façon, après un voyage en train, c'est difficile de ne pas être au moins mélancolique. Et comme si ça ne suffisait pas, j'ai écouté des musiques déprimantes, chargées, peut-être trop. Elles sont belles, mais comme toutes les belles choses, elles font mal.
M'enfin, l'aller avait été plus glorieux, côté fenêtre... J'avais même
été réveillée avec bonheur par une petite voix de gosse. Il n'y a que les gosses qui parlent à haute et intelligible voix dans les trains. Ils n'ont pas peur qu'on entende leurs conneries, eux. Le petit disait des choses ridicules et passionnantes. "Plus tard, j'irai dans les carrières au Maroc, pour trouver du vrai henné et me faire un tatouage. Hein Papa ? Et plus tard, je s'rai le p'tit Gavroche. Hein Papa ?" Mais la mère a stoppé net le flux. "Shht !" Dommage, j'aurais adoré connaître la suite des futures aventures de Gavroche.

Samedi, à Gare de Lyon, j'étais heureuse, comme un poisson dans l'eau prêt à prendre le large. Même cet ignoble buraliste n'a pas réussi à entamer mon enthousiasme. Il
était méthodiquement odieux avec tous les clients. Il n'avait évidemment pas mes Camel, et m'a plus jeté à la figure que vendu ses vieilles Marlboro. Raison de plus pour fumer "moins" et faire quelques heureux, je crois.

Puis l'ignoble buraliste et la méchante voisine de train ne me font plus aussi mal qu'avant. Le temps des désillusions est terminé. Les quelques années passées auront été vouées à un apprentissage difficile, un bourrage de crâne insatiable, une sorte de stage de l'extrême pour me dire que non, le monde n'est pas une montagne aux monts enneigés blindés d'Edelweiss. Il m'aura fallu un certain temps et une montagne de larmes, tout de même, pour encaisser l'affaire. C'est fait, la désillusion est effective, et je peux passer et penser à autre chose, maintenant. Je ne sais pas vers quoi je me dirige, la décadence ou la sagesse, chez Gainsbourg ou Gainsbar, vas savoir. Je vous tiendrai au courant.

A travers les vitres du train, on voyait la nuit tomber, tout
doucement. En un rien de temps, la journée était pliée, comme si rien n'avait compté, comme s'il fallait l'oublier. Une journée comme les autres, ni mieux ni pire, que j'avais aimée car il le fallait. C'est plus facile et moins fatiguant d'aimer que de détester. Puis le noir.

J'ai gambergé dans le train, gambergé dans les montagnes, gambergé dans le silence des nuits Romanaises. Des nuits au calme abyssal, où je n'entends que mon coeur qui n'arrête jamais sa course, lui. Un tel silence, je n'ai pas l'habitude. Il m'ouvre le vide, me file des vertiges, comme si je tombais sans jamais m'écraser. J'aime ça, j'ai besoin de ça. J'avais aussi en tête de refaire une sessi
on "memorable quotes from McDo", mais il fallait que je me souvienne de toutes ces perles qu'il ne faut justement pas perdre. En cherchant bien dans cette case de ma mémoire, je n'ai que les répliques récentes, et hélas, pas les meilleures. En tout cas, les clients ont une imagination débordante, dans un sens comme dans l'autre. J'oublie le pire, et je garde le plus beau. J'ai appris à deux reprises que j'étais "douce", dans un sens comme dans l'autre. Il faut tout de même me caresser dans le sens du poil pour voir ce côté là.

Me revoilà à Paname, et comme quand on boit un verre de trop, je suis partagée entre le soulagement et les regrets. Soulagement d'avoir terminé un voyage en mauvaise compagnie. Regret de n'avoir pas pu rester plus longtemps dans le sein des montagnes, mes montagnes chéries. Je reviendrai.

Maintenant, je me confonds dans la foule, dans Paris, après trois jours sans avoir vu plus de quatre personnes. Il ne me reste plus qu'à observer les marcheurs
en avance rapide, et jouer à deviner quelle peut être la complexité de leur vie. En déambulant comme ça, ils deviennent des corps vides et simples. Moi, j'aimerais connaître les pensées, les souvenirs, les angoisses, tout ce qui se cache dans ces corps solides, rapides et finalement creux. Idem dans le train, je me demande où vont vraiment ces gens, d'où ils viennent, voir qui et pourquoi. Xavier et moi posons la même question au monde : "C'est le bordel chez vous aussi ?"

jeudi 12 avril 2007

Artificial animals Riding On Neverland

Je n'avais pas encore vu Je vais bien, ne t'en fais pas. C'est fait, et je me sens tout chose. L'histoire de cette Elise qui perd son jumeau, cette Lili, qui n'a plus envie de rien, ni de manger ni d'aimer, de sa solitude soudaine, son coeur qui tombe en poussière, ses sourires forcés, l'incompréhension, l'incomprise, la lutte contre ceux qui ne comprennent pas, qui ne saisissent pas ce que c'est, un jumeau. J'appelle dans la foulée le besson pour le menacer et l'engueuler, lui dire qu'il n'a pas intérêt à disparaître comme ça, un jour, et qu'il n'a pas le droit de me laisser là, toute seule.
Bon film, mais voilà, maintenant, je balise, je me fais des idées noires. J'imagine le pire et sa suite encore pire. Le monde se replierait comme un vieux tapis rouge, et mon coeur, pauvre coeur, lui, il devrait s'arrêter !

lundi 9 avril 2007

Your world. Your imagination.

Petit week-end de Pâques au poil, même si on a malencontreusement oublié le bénédicté autour de l'agneau dominical. On omet volontairement la journée de samedi, semblable à toutes les autres, à vendre et revendre la quantité de sandwiches à base de ketchup et steak mou, pour mériter ma soirée dans le RER A toujours blindé, qui pue comme je pue la frite, qui crie et qui chiale pour le plaisir.
Dimanche soir de galère dans la fratrie, à la recherche de tune ou de matos pour égayer les esprits. Flop. On payait ces blasphèmes lancés sur le chemin de croix de Jésus, et autres sujets sacrés aux routes tout aussi sinueuses... Mais enfin, on ne sait toujours pas vraiment de quoi est faite sa douloureuse couronne d'épine. D'Aubépine ?

Finalement, la nuit s'est ouverte sur un poker toujours au poil, peu catholique mais efficace. J'ai ruiné mes frères, avec des petits brelans et full aux as bien placés, sans oublier les coups de bluff et LA suite royale assassine. Ce jeu est un jeu de femmes, qu'ils disaient. J'aurais dû jouer toute ma fortune, et partir ce matin pour les Baléares. Avec ce petit soleil au poil, j'ai envie de tremper mes petons dans un océan, peu importe lequel, juste salé et transparent, avec une petite pointe de bleu-vert. Le sable qui file entre les doigts de pied, bref, la totale.
Al Green et Samarabalouf, vous êtes les bienvenus sur mon île !

jeudi 5 avril 2007

Les risques du métier

Je marche comme une furie dans l'avenue, comme d'habitude, à la recherche d'un HSBC pour ruiner encore un peu plus mon compte en banque. Il fait beau, et le peuple marche comme moi, à toute blinde, comme d'habitude. Mais je n'imaginais pas qu'une partie du peuple, et pas la plus vilaine, déambule en roller sur les trottoirs, sans penser qu'elle risque de bousculer un passant au coin de la rue. Jusqu'au moment où ce jeune homme est arrivé et m'a presque roulé dessus. Quelqu'un qui marche vite a de nombreuses chances de rencontrer quelqu'un qui roule vite, et que tout le monde se fasse mal. Mais il s'est excusé deux ou trois fois, avec les mains devant sa bouche qui signifiaient mieux que tout son embarras. Comme dirait l'autre, il n'était pas parfait, mais il était charmant.
Période de deuil et de doute. Période de crue lacrymale, qui creusa le sillon de mes rides futures. Mais jeunesse passera, et quand je serai ratatinée, vieille et heureuse, mes rides seront tracées. Peut-être que je ne pleurerai plus autant. J'espère que je rirai autant, et que l'un sans l'autre fonctionne. Qui sait.
Peut-être que les fouinards ne s'arrêteront plus pour me demander si je suis germanique, catholique, juive, arabe, comédienne ou anglaise. Car en 21 ans, j'ai eu droit à toutes ces curieuses interrogations, toutes aussi farfelues les unes que les autres, auxquelles j'ai répondu en un simple et sec mot. Etrange pourtant : dans ce lot de supputations vaseuses, personne n'a jamais subodoré l'italienne, la libanaise, la jumelle ou celle qui a la haine. Le fouinard aurait alors fait mouche.
Peut-être que mes rêves se seront assagis. Je me souviendrai de cette vie onirique passée, de ces réveils en plein milieu de la nuit, de ces secondes interminables qu'il faut pour retrouver un semblant de réalité, me rendre compte que je ne suis pas morte, que je n'ai pas une balle dans le ventre, et que cet homme qui tourne les pages d'un journal dans la pénombre n'est que le fruit de mon imagination. On me conseille de noter mes rêves, mais si je les décris dans le détail, c'est comme s'ils se dérobaient. De toute façon, plus ils sont fous, plus ils restent chauds dans ma mémoire. Je me souviens encore de la rougeole du Professeur Tournesol et du squelette géant qui se bat contre Moby Dick. C'est dire.
Ou alors, ce sera pire, et je verrai tout cela de mes propres yeux, car à défaut d'être jeune et conne, je serai devenue vieille et folle. J'aurai abandonné depuis longtemps mon regard franc et triste, et le voile de la névrose envolera mes pensées vers un autre monde. Tout compte fait, j'attendrai patiemment les pages fripées de cette époque.
Je devrais bosser, au lieu de dire des bêtises.