mercredi 29 août 2007

Et la ville lumière fut


Il aura fallu un certain temps pour que Paris me manque.



Cette ville, il faut la quitter pour l'aimer. C'est à dire qu'il faut l'avoir habitée. Les premières années, j'étais sous son charme. J'étais au coeur d'un mythe. C'est toujours grisant. Et certaines rumeurs éculées sont bel et bien fondées. Paris ne dort jamais, par exemple. Les périphéries sommeillent peut-être, mais le coeur ne cesse jamais sa course. On y voit tout. C'est une ville d'expériences.


Parce qu'on ne vit pas à Paris, on vit avec Paris. C'est une vraie bonne relation à l'ancienne. Après quelques années de vie commune, on finit par se sentir oppressé. On aura à eu des coups de gueule et des coups d'amour. C'est selon les jours, selon son humeur. On aura même rompu plusieurs fois, on l'aura fuie tout un été avec plaisir.

On la quitte sans se retourner. On la boude. Puis la séparation devient longue, on se souvient d'elle et elle nous manque. Et ça dure comme ça plusieurs années. On devient un parisien amoureux. Avec tous les désordres, tous les paradoxes que ça entend. Elle est belle, elle est chiante. Elle me rend malade. Elle me manque. Je veux la retrouver, mais je sais qu'elle me trompera encore.

J'ai retrouvé Paris aujourd'hui. Elle me manquait. Une fois le pied sur le macadam, après quelques coups de coude et quelques passants pressés, je ne voulais qu'une chose : repartir. J'ai flâné rue Mouffetard, aperçu l'entrée du Jardin des Plantes, pratiqué le métro. Ni mieux ni pire, rien ne change. C'est toujours beau et moche.

Paris m'aime, moi non plus.

mardi 28 août 2007

Le rouge et... les cris


Il y a des films, comme ça, que les parents nous interdisent de voir, tant qu'ils sont encore maîtres de nos petits yeux d'enfants.



Le Syndrome de Stendhal est sorti en 1996, j'avais donc dix ans. C'était, je l'admets, bien trop jeune pour encaisser ce genre-là. De toute façon, on est toujours trop jeune pour regarder un film de Dario Argento. Ce gars-là est complètement frappé, inquiétant, mais son talent est indéniable.

Ma mère ne voulait même pas m'expliquer ce qu'est le Syndrome de Stendhal. J'ai fini par élucider ce mystère par moi-même, et la réponse fut à la hauteur de mes espérances !

Après avoir pris connaissance de ce mal sordide, je me suis empressée d'acheter le DVD de Dario. Je ne savais absolument pas de quoi il retournerait, sauf peut-être, que j'y verrai un personnage atteint du syndrome, quelqu'un qui serait pris de vertiges et d'hallucinations hallucinantes face à une oeuvre d'art. Rien de plus. Mais il fallait que je vois ce film, objet de tous les délits !


Ce quelqu'un, c'est Asia Argento. Et que dire, à part qu'elle est bien la fille de son père ! On la connaissait provocante et vulgaire à ses heures, mais dans ce film-là, elle est toute jeune, trop sensible et bien trop innocente pour échapper à un tueur-en-série-doublé-d'un-violeur-sadique-beau-comme-un-dieu.

Après le déménagement vient l'emménagement. Il ne fut pas beaucoup plus simple. Nous avons bricolé sans relâche, décollé, peint, scié, acheté, posé, construit. En somme, tout ce qu'un être humain est capable de faire de ces mains. Maintenant, la chambre est terminée. Elle est resplendissante, lumineuse, un vrai havre de paix qu'il me tarde d'investir.

Nous nous sommes donc retrouvés avec nos mains, mais ne sachant plus trop qu'en faire. Et voilà que mon frère, désemparé, veut regarder le Syndrome. Lui qui ne l'a pas vu pense que ça passera le temps, et que c'est l'occasion ou jamais de voir ce film interdit. L'ayant déjà pratiqué, je le mets en garde.
« Dario Argento n'est pas Michael Bay, ce n'est pas un passe-temps ». Il ne veut rien entendre. J'abdique.

« Non mais attends, ça pue ce film ! » Mais il n'a pas vu la fin. Il est parti en trombe, me laissant seule avec Asia et ses fantasmes délirants. Comment peut-on décemment quitter l'écran devant un film, d'ailleurs ? Je n'ai jamais compris. Je lui accorde que Dario a son style, que les cris stridents sont son péché mignon, et que le genre horrifique italien n'est pas des plus fluide. Mais il faut le regarder d'un bout à l'autre ! Alors, on se met à apprécier la spirale d'emmerdes et toute l'horreur de l'histoire.

Moi-même, je n'avais pas tout saisi au premier jet. Maintenant ça y'est, j'ai saisi ! Il m'a fallu tout le générique de fin pour remettre en ordre mes idées et comprendre Anna Manni. C'est complètement tordu, et il faut avoir pondu des Suspiria et autre Inferno pour sortir un tel film, de tels préceptes, terrorisants ma foi.

J'ai aussi compris qu'avec Dario Argento, plus on comprend, plus on a peur.

lundi 27 août 2007

Rouge Mécanique


Alors que mes frères règlent des affaires de voisinage, tentant de sauver des relations au combien complexe, tentant de mood-makerer la ville, je me plonge dans le dernier numéro de Télérama. Le mois d'août touche à sa fin. Il est temps de reprendre des lectures laissées à l'abandon, de s'intéresser à nouveau aux articles bobo de mon magazine fétiche...



Je tombe sur cet article poétique du Téléramdam. C'est bien connu pourtant, les faits divers sont une rubrique de chiens écrasés, sordides, voire malsains, donnés en pâture à des lecteurs curieux qui s'ennuient. Mais cette fois, celui-ci vaut le détour, et appelle plus aux vallons lyriques de nos âmes qu'autre chose. Ce petit côté Pierre Pinoncelli au féminin m'a fait fondre. Chacun son dada... :



" C'est le petit scandale de l'été. A la fin du mois de juillet, dans une salle de la collection Lambert en Avignon, une jeune femme visitant l'exposition consacrée à l'oeuvre du peintre américain Cy Twombly dépose sur un monochrome blanc une trace de rouge à lèvre. Interpellée, cette artiste de 30 ans affirme qu'elle a senti que la toile l'appelait en lui demandant : 'Embrasse-moi.'

L'affaire aurait dû être jugée le 16 août dans le cadre d'une reconnaissance de culpabilité mais, puisque la jeune femme nie la dégradation de l'oeuvre et plaide l'acte d'amour (!), le tribunal correctionnel de la ville tranchera le 9 octobre. D'ici là, on l'espère, l'empreinte écarlate aura été effacée puisque même un laboratoire de la Nasa s'est proposé de nettoyer le rouge à lèvre, dont la composition chimique, sachez-le mesdames, est à la fois secrète et extrêmement complexe. Il faut ajouter que Cy Twombly, âgé de 79 ans, est l'un des plus grands artistes vivants et que la toile endommagée fait partie d'un triptyque évalué à 2 millions de dollars. Evidemment, les journaux télévisés - le baiser stupide, et peut-être opportuniste, a eu au moins le mérite de les intéresser à cette exposition magnifique - ont beaucoup insisté sur le prix de l'oeuvre. C'est la face la plus spectaculaire mais aussi la plus médiocre de l'art.

Ainsi, le soir du vernissage, une dizaine d'employés de la galerie américaine Gagosian (la plus grande du monde), vêtus comme des X-Men, veillait sur le peintre comme s'il s'était agit d'un coffre-fort. Vers la fin du repas, le vieil homme, qui s'ennuyait, quitta la table des festivités et alla s'asseoir seul à une autre table. Sur la nappe, en son honneur, le restaurant avait posé des fleurs de pivoines [...]. Cy Twombly prit une fleur dans ses mains et la contempla longuement - son visage devint radieux. Mais l'artiste, émerveillé par la splendeur de la nature, ne vit pas venir vers lui l'un de ces 'Gagosian boys', qui lui ôta la fleur des mains en lui disant : 'Vous aimez cette pivoine, M. Twombly, je vous la fais monter dans votre chambre.' Le vieil homme, désemparé, regarda un instant ses mains vides, puis la salle, puis à nouveau ses mains.

Nul tribunal ne condamnera jamais cet autre geste imbécile. Et l'on se dit que le baiser, plutôt que de souiller l'oeuvre, aurait dû, comme une caresse consolante, être déposé ce soir-là sur le visage triste du poète. "

dimanche 26 août 2007

Rétrospective


Il y a des avantages à subir un été pluvieux. Au moins, on ne culp
abilise pas de rester planté devant des films.


Le paysage cinématographique ne me tente pas vraiment. A part Planète Terreur, La Fille Coupée en Deux et Boarding Gate, que j'irai voir dès que possible, le reste m'indiffère pas mal. Death Proof et Les Chansons d'Amour ont fait péter à eux tout seul le quota qualité de l'année. J'attendrai des jours meilleurs.

En attendant, je me régale. Je revois des films merveilleux, dont je ne me lasse pas, qui ne m'ont pas ennuyée, même sur un écran de télévision.

Dans la masse de films que je vois au cinéma, il y en a peu qui passent le cap d'un second visionnage. Garden State, par exemple, m'a beaucoup déçue. Moi qui m'était emballée comme une écolière l'an dernier, je le trouve maintenant d'un niais pétrifiant. Si ce n'est pas le film qui change, c'est moi.

En reva
nche, l'ignominie de Frank Costello m'est allée droit au coeur ! J'ai retrouvé Les Infiltrés avec émotion. Quitte à le voir trois fois en une semaine ? Quitte à le voir trois fois en une semaine.

La palme de longévité revient sans contes
te à Alien IV : Resurrection. Chair d'ampoule ! C'est un film culte. Il fait partie de ma Collection, la pupille de mes yeux, la peau de mon cul.


C'est le meilleur des quatre, décalé, cynique, impressionnant, et terrorisant. Je griffe encore le cuir du canapé quand la troupe de bestiaux course les survivants sous l'eau, tous en apnée, et qu'une y passe, forcément. Sigourney Weaver joue les prédateurs avec brios, et bon Dieu de merde, elle est angoissante. Ses bébés sont dégoulinants, vraiment méchants, vraiment malins, vraiment flippants. Winona Ryder est de loin le plus joli des robots, plus humaine que les humains, celle qui veut sauver le monde, celle qui se fait trahir tous les quarts d'heure, donc. Les effets spéciaux ont beau avoir dix ans, ils n'ont pas pris un pète. C'est toujours aussi baveux, aussi acide !




Avant le film culte, il y a eu un bijoux. Une pierre discrète qui ne paie pas de mine, qui n'est pas taillée pour le grand public, mais qui vaut son pesant d'or.

El Laberinto del Fauno, Le Labyrinthe de Pan.
Un film espagnol de l'excellent Guillermo del Toro. Alors forcément, les dialogues sont somptueux. Un espagnol me dirait d'aller me faire foutre, je n'y verrais que du feu. Parce que je n'y comprends rien et que ça sonne, ça chante, c'est beau. C'est une histoire déchirante, pour le coup. Un film devant lequel je remplis une bassine de larmichettes, petites mais sincères. C'est un mixte bien léché entre l'Espagne franquiste et l'imaginaire débridé d'une fillette malheureuse. C'est à déconseiller aux coeurs sensibles, car
le suspense et le gore sont de la partie. Mais c'est un labyrinthe ! Il y en a pour tous les goûts, à condition de suivre les bons chemins. C'est un film historique, un conte fantastique, bon, beau, tout.








Il y a eu Requiem for a Dream, aussi. Il m'a so
ulevé le coeur. Je l'avais déjà vu pourtant. Mais cette fois, ces drogués m'ont renversée. Parce que cette fois, je comprenais parfaitement le pourquoi du comment. Ils veulent se fixer dans un moule, quitte à se faire un fix. C'est pathétique. Dans une situation de merde, les shoots deviennent une compagne idéale. C'est humain.

samedi 25 août 2007

Smoking killers


Coffee ? Cig ? (Généalogie d'un crime)



C'était des choses réservées aux grands, choses qui ont pourtant enfumé et embaumé ma jeunesse. Fermement coincée entre le majeur et l'index droits, une Philip Morris ; pendant que l'auriculaire gauche caressait le sourcil gauche. Ma mère fumait, je la regardais. Elle lisait son canard, tirait, aspirait, soufflait.
Nous sommes trois enfants, et petit à petit, nous avons tiré, aspiré et soufflé.


Je me souviens de ma première cigarette, celle que j'ai fumée d'un bout à l'autre. Et je suis satisfaite que cette maudite-là ne soit arrivée qu'autour de 20 ans. Avant, j'avais tiré des taffes en suisse, sur une clope qu'un de mes parents avait oubliée. Il leur arrivait souvent d'avoir deux ou trois cigarettes allumées. Une dans le salon, une dans la cuisine, éparpillées grosso modo partout dans la maison.

Cette première, je l'ai fumée à Choiseul, en plein jour. J'avais un paquet sur le bureau, plein et emballé. Il traînait là depuis des semaines. Je l'avais acheté un jour, comme ça, sans savoir pourquoi et pour qui. J'étais malheureuse, ce jour-là. Ca ressemble à un cliché.

Mais pourquoi, après 20 ans de clopes sous mes yeux, ai-je décidé de m'y mettre maintenant ? Le désarroi, l'ennui. Je m'ennuyais. Je ne voulais pas bosser mon Giquel, je ne voulais pas entendre parler de Code Civil ou de droit international. Je voulais faire autre chose. Quelque chose qui a bonne presse, quelque chose qui est mauvais pour le corps et bon pour le moral. Ca coïncidait parfaitement.


Il était là, sous mes yeux. J'avais évidemment acheté les mêmes que ma mère. Philip Morris ultra light. Mais je n'avais pas trouvé bon de prendre un briquet.
Je l'ai allumée avec ma plaque électrique. Après cinq minutes d'acharnement, j'avais le bout du nez rouge, ça sentait le brûlé, mais elle puait donc elle fumait !


J'ai dégusté la chose à ma fenêtre. Puis j'ai arrêté, repris, arrêté... Puis repris, évidemment. Les premières me faisaient un effet incroyable. Ca picotait jusqu'au bout des doigts. Tout un tas de minis décharges déséquilibraient mon petit corps pur. C'était une sensation délicieuse, un sentiment de plénitude.

Le moment était malgré tout mal choisi, puisque nous autres fumeurs sommes actuellement les êtres les plus inconscients et les plus dangereux de la planète, après Al Quaïda. Well fucked, hm ?

M'enfin, j'avais de la nicotine dans les poumons depuis toujours. Mieux valait jouer franc jeu. Et une clope, après avoir bricolé, bossé, gueulé ou câliné, ça diffuse du bonheur dans les veines. Comment dire à un jeune adulte qu'il risque de mourir ? A 21 ans, on est immortel.

Je ne suis pas vraiment dangereuse. Assez heureuse d'être inconsciente. Surtout, je suis avide de petits plaisirs faciles.


Pour le plaisir de coincer ma mort entre le majeur et l'index ?
Fair enough.

mercredi 22 août 2007

Il s'appelle reviens


I'm not gay, but I like rainbows.



Quand j'ai commencé mes études, il y a trois ans, on m'avait promis un tas de choses. Les patriarches parlent beaucoup et peut-être trop. Ce n'est pas une vie si belle, ce n'est pas non plus si terrible. C'est la tranche intermédiaire.

J'ai l'enfance et l'adolescence derrière moi, ces deux cockers qui me collent aux basques. J'ai l'âge adulte devant moi, que je touche du bout des doigts. Quand on a 20 ans, on est jeune. Pour mon petit frère, j'ai 150 ans. Question de point de vue.


A vrai dire, je m'égare. Ce n'est pas mon propos. Mon propos, c'est ma plus belle rencontre depuis ces trois dernières années. La seule qui tienne et qui m'accroche le coeur.

Il est arrivé, l'air de rien, avec son crochet. Nous avons perdu pas mal de temps. On se voyait peu. C'était court et intense. Puis la vie parisienne a appuyé sur la détente. La balle est partie. Nous sommes sortis, nous avons bu comme des trous, mangé comme des porcs, dansé comme des fous, ri comme des baleines. Bref, nous avons fait connaissance.


J'ai trouvé un énième double. J'ai pourtant déjà un jumeau, mais nous ne nous ressemblons pas. J'ai pourtant déjà des amis chers, mais ils ne me ressemblent pas.

Lui, il parle beaucoup, il pense trop. Il sait être mélancolique et triste, désabusé et pessimiste. Comme moi, il sait être excessif. Il m'aura aussi appris à être gaie, à aimer les autres plus que le strict nécessaire, à m'aimer plus aussi. Quelqu'un de bien, je vous dis.


Maintenant, il a 21 ans. Comme moi, il est jeune et il a 150 ans. Et il s'en va, va se fondre dans la movida madrileña, et il me manquera. Il me manquera quand j'aurai le moral à zéro. Quand j'aurai besoin que quelqu'un casse ma coquille de Caliméro. Sa petite cicatrice au bord de l'oeil, l'odeur de sa Peugeot, ses polos rayés, ses dents parfaites, ses yeux gris et bleus, sa voix grave et nasale, ses mains fines et ses Converses rouges...

Mais j'irai le voir. Et il s'appelle reviens.

lundi 20 août 2007

Education normande


La vache, le camembert, le cidre et la mer...




Comme toi Gustave, mes émotions sentimentales et esthétiques les plus vives furent trouvillaises. Comme toi Marcel, mon temps perdu est éparpillé dans Cabourg. Avec mes deux compagnons, je vous ai retrouvés. Vous n'avez pas changé depuis dix ans, vous étiez toujours aussi beaux et majestueux, et – ce dont je ne m'étonne pas - les normands avaient pris grand soin de vous.


Sur l'autoroute, nous avons raqué du péage. Rejoindre les côtes est devenu un luxe. Les odeurs furent notre plus sérieux plan de route. Plus ça sentait la vache, plus nous approchions du but. Cette odeur exécrable de fumier envahissait nos petites narines parisiennes, et nous pestions. Mais cette odeur, cette fois, c'était un parfum. Celui de la Normandie, celui qu'on ne sent pas à Paris, celui que je n'avais pas senti depuis dix ans.


Nous nous sommes accommodés des radars, de la flicaille deauvilloise et du manque de toilettes publiques. Nous avons doré sur la plage trouvillaise, sous un ciel anglais ; l'un de mes ciels favoris, un plafond remplis d'immenses nuages noirs et plats, percé par des rayons vifs, un combat perpétuel entre le paradis et l'apocalypse. On aurait presque entendu le son des trompettes. Sauf qu'ici, c'aurait été celle de Louis Armstrong et son What a wonderful world. Je suis une bien mauvaise catholique, admettons !



Des escaliers vertigineux m'ont rappelés Montmartre. Du haut de la colline, c'était la mer au loin, c'était Montmartre sur Mer. J'ai appris quelques rudiments d'architecture, grâce à mon Charlie. Ne te méprends pas Gustave, mon Charles est bien plus passionnant que ne le fut celui de ta pauvre Emma.


Nous avons dévoré la mer dans une grande assiette. J'y ai dégusté les mets marins les plus fins, ces petits crustacés au goût inimitable. Les crevettes, les huîtres, les bulots, le homard, les langoustines. Le tout accompagné d'un Sancerre divin, qui, après quelques verres bien pleins, m'alourdit l'esprit d'une belle ivresse marine.


J'ai attiré l'oeil d'un beau normand, style viking moderne, aux cheveux blonds en bataille, à l'élégance acquise, aux pommettes hautes et au regard flatteur. J'aurais pu lui écrire un million de lettres, comme ta Sand. Ses parents, en revanche, ressemblaient plus à un couple cabourgeois actuel, de la haute, qui m'eurent mise dans l'embarras et le dégoût au moindre contact.


L'eau était bonne, l'écume était douce, le sable filait entre les doigts de pied. Le vent violent collait du sel sur nos joues roses. Tout ces plaisirs normands, aussi tendres et envahissants soient-ils, ne nous ont pas empêchés de mener nos conversations tambour battant.


Le temps courait, la voiture roulait, les langues se déliaient. Nous ne recherchions pas le temps perdu, nous n'évoquions pas nos madeleines, nous écrivions notre nouveau roman, le normand.



vendredi 17 août 2007

Dream a little dream of me


Quand les dés ne sont pas encore jetés, quand la peau de l'ours n'est pas encore sur la table, on peut toujours s'empifrer de belles images et de beaux projets... On peut penser à plusieurs choses à la fois, foutre le bordel dans sa tête et dans ses rêves. Il n'y a pas encore de gagnant, tout est possible.




...




...




...


...


Je vais chasser mon ours...

jeudi 16 août 2007

Very lynchéen


Ce que pense une femme, par exemple, parfois.







Jerry Seinfeld : "Women, do you really wanna know what men think ?!
- Hell yeah !
- Nothing."

mercredi 15 août 2007

Love, summer, talks and storm


Certains auguraient du beau temps pour ce 15 août. « C'est férié, qui sait où Murphy se cache ? » Murphy était donc bien caché derrière un buisson de feuilles mortes !


Nous avons retrouvé mon capitaine abandonné, qui se sentait bien seul et mal-aimé, ces derniers jours. C'était un bonheur de le voir quelques heures, quand même, ce petit Choiseul. Sans ses stores, il était baigné de lumière, redevenait un enfant qui n'a rien vécu. Le quartier était vide, beau, tranquille.


J'apprends à bricoler, à démonter, à me faire mal, à réparer, transporter, bouger. Il faut souffrir pour déménager. Nous avions une grosse voiture, un gros plan de Paris, de gros sens uniques, une grosse pluie, mais le coeur y était. Ça papotait entre deux tours d'ascenseur, coincés derrière les planches, les caissons, la chaise, le paravent ou mieux encore, le cactus.


Bien fatigués et affamés par de telles activités, avides de viandes fraîches à se mettre sous la ratiche, 16h passées, nous nous sommes rués dans un Hippo vide, enfilés un Martini, un steak saignant, des frites, de la sauce béarnaise et... une 'petite carafe d'eau'. Le tout accompagné de conversations toute aussi saignantes, ou l'art de mâcher et de parler en même temps.


Le parc de Bercy prend de l'avance. On y balaie les feuilles mortes. La pluie bat son chemin paisiblement et sans relâche. C'est une pluie automnale, celle qui trempe. Les talons résonnent sur le sol humide. Sous nos pas, les feuilles crissent et se brisent en mille morceaux oranges. Sous les arbres, l'eau perle. Il pleut même quand il ne pleut pas.


Une bien belle journée d'automne.


Il fera bientôt nuit. Le bain coule, la mousse mousse. Je vais me noyer une heure dans ma baignoire, et quand je sortirai, il fera nuit.


Qui sait, ce sera peut-être l'hiver ?

vendredi 10 août 2007

Allées et venues aoûtiennes


Cet été serait utile comme un cul à la place du coude, s'il ne m'en arrivait pas tant de bonnes. Il fait un temps de chien. Au début de la déshérence estivale, je pleurais comme un crapaud amoureux. Maintenant, à défaut de me faire dorer la pilule, je vois des gens extravagants, dont l'auguste pluie tape sur le ciboulot.


A partir de 20 ans, on pose à une jeune femme la même question, jusqu'à ce que ménopause s'en suive : « Il en est où, le bébé ? » On se souvient de ce qu'on répondait à « Tu veux faire quoi plus tard ? », et on sort le même charabia, qui contente une majorité de curieux. Hier soir, j'ai répondu aussi vaguement que la question est vaste. Et le valeureux « On verra » fonctionne toujours.

En ce 10 août, je n'aurai pas fait dorer ma pilule, j'aurais mis quelques pulls, pris une douche bien chaude et silencieuse, mais j'aurais aussi rencontré un homme en détresse sexuelle. J'aurais aussi récupéré mon dû à Rivoli, rendu les chemises qui puent et le pantalon neuf et mal taillé. J'envisage l'usage le plus noble pour ce chèque bien gras. Un festin, une heureuse agape, une belle bambochade.


Sur le retour, sur la longue avenue Roosevelt, je marchais tranquillement. Je vois, loin devant, un passant. Pour sûr, nous allons nous croiser. Je lève les yeux à son passage, prête à dire bonjour, même. J'étais dans de bonnes dispositions. Le résultat de cette heureuse humeur s'est soldé par une bouche fermée et une braguette ouverte. Sortait de là un auguste pénis, en bonne forme.


Des histoires qui se terminent grassement, donc.


Arthur, je confirme, cet été est passionnant.

mardi 7 août 2007

SdS

Sachant qu'un artiste rabâché est un artiste dont on parle trop, je m'excuse auprès d'Amy Winehouse, demoiselle qui reprend les Supremes et la Soul, car je m'en vais lui remettre une couche de compliments. Si sa place dans les charts s'écrase au sous-sol, toutes mes excuses :

Mais comment ne pas s'émerveiller devant une nana qui m'emmène tout droit vers les années d'Al Green, de Marvin Gaye, Etta James ou Betty Lavette ?! Actuellement et sur le marché, c'est la seule qui le fasse, et qui le fasse bien – très bien.
Un tel emportement pour une chose bien mince : vous donner son You know I'm no good, parce qu'il faut bien en choisir une, nous n'avons pas toute la nuit ; et comme moi, ne plus entendre, écouter :) :

dimanche 5 août 2007

A fish is a better friend than a human

' Vivre sur un nuage... Parcourir le monde à tes côtés... Traverser les mers sur notre voilier... Esquisser ta silhouette voyager dans le noir... Voir passer les jours dans tes yeux pleins d'espoir... Marcher main dans la main et construire demain... Apprendre à danser au rythme de tes baisers... S'endormir chaque nuit l'un contre l'autre...
Ecrit avec une plume amende,
Scellé par le temps éternel... '


De l'espoir, j'en avais. En long, en large, de travers. L'espoir fou des transitions transies. J'ai été grisée, brisée, heureuse et malheureuse, j'ai été amoureuse. Amoureuse plus que tout le reste.

Le temps passe, les brocs d'eau tournent. Les beautés inestimables deviennent estimables.

Un ange passe. On se croise, ça fait tilt et ça fait boum.

samedi 4 août 2007

Motivés ?

Hélas, on ne peut pas quitter un appartement les mains dans les poches. En quelques années, on a toujours le temps d'entasser un nombre incroyable de conneries, de préférence lourdes et encombrantes. Et ces conneries, on ne les laisse pas au propriétaire. On les remballe, et on les bouge ! Hélas, nous n'avons pas tous la chance d'avoir le permis – que dis-je, une voiture.

Il fallait donc se mettre un coup de pied au cul pour rejoindre Choiseul, s'y poser, emballer et embarquer le tout le lendemain matin.

Nous arrivons, avec nos quatre bras musclés, fiers et confiants. Il est 17h. On emballe. Il est 21h. Il fait faim. Hop, un McDo devant Nicolas Hulot.

Après quelques sandwichs, une siestette de vingt minutes, toujours devant Nicolas Hulot. Je pourrais me coucher maintenant. Je dormirais comme un bébé. Mon frère se réveille, me réveille : il a une idée. On pourrait faire un aller-retour Choiseul-Choisy ce soir, histoire d'être avancés ? Il n'y aurait personne dans les transports, il ne ferait pas trop chaud. Excellente idée. C'est décidé, nous partons chargés comme des mules. Il est 22h.

A Pyramides, le diable lâche un pied de la table basse. Les portiques sont une plaies, les escaliers un délice. Les trains sont toujours bien remplis. C'est lourd, c'est fatiguant, mais nous arrivons à bon port. Le temps de déposer tout, et on repart pour Paris, les valises et le diable vides. Il est 23h.

Mon frère a une autre idée. Peut-être pourrions-nous tenter un deuxième aller-retour, car « déménager, c'est vraiment mieux la nuit ». Ragaillardie par notre premier voyage nocturne, je tombe d'accord avec ce bon sens fraternel. Il a l'air motivé, suivons le !

Premier accroc : nous poireautons une demie-heure à la gare. Il est 00h. Nous arrivons enfin à Choiseul, à nouveau. Nous avons une demie-heure pour remplir les valises et choper le dernier métro.

Il est 1h. Nous n'avons pas pu fermer cette putain de valise, trop pleine. Elle est ficelée, tous les bagages sont blindés et ficelés. Nous avons l'air de gitans sur le départ. Il n'y a plus de métro. Nous savons qu'un Noctilien qui part de Gare de Lyon va jusqu'à Choisy. Il faut donc aller à Gare de Lyon par nos propres moyens, c'est à dire à pieds. Il pleut des cordes. Le trajet prendrait une demie-heure. Nous attendons que le ciel s'éclaircisse.

Il est 2h, la lune apparaît enfin. Elle est ronde et lumineuse, idéale pour une ballade nocturne. Nous partons, parfaitement conscients de notre folie, vu la difficulté de l'épreuve qui nous attend.

La grosse valise fait 30kg. Les deux autres, plus petites, font chacune 15kg. Nous sommes deux. Le calcul est rapide : c'est lourd, c'est long. Boulevard Haussman, Bonne Nouvelle, Poissonnière, Place de République, boulevard du Temple, Filles du Calvaire, Sébastien Froissard, Place de la Bastille, rue de Lyon, avenue Daumesnil, rue de Lyon, Gare de Lyon. Le trajet n'a pas duré une demie heure. Il a duré deux heures. Il est 4h10.

Le dernier Noctilien était à 4h. La grosse valise n'a plus de roues, nous la tirons depuis 2km. Nos mains sont ruinées, nos bras gonflés, notre gosier sec, nos yeux humides, nos yeux rouges, nos yeux petits. La fatigue, l'effort, les limites. Nous avons fait une longue marche avec des boulets de 30kg aux pieds.

Il faut attendre, maintenant, la ligne 14 reprend à 5h30. Il ne faut pas s'endormir, comme ces gens-là qui dorment par terre, qui jonchent les grands boulevards et toutes les gares. La Gare ouvre. Il est 5h30.

Nous sommes jeudi matin, elle est vide, seulement quelques ouvriers qui s'affairent autour d'une bouteille géante Heineken. Nous devons attendre. Mes pieds aussi, sont ruinés. Un distributeur de boisson fraîche, il faut trouver un distributeur de boisson fraîche. Nous perdons 2€ dans l'un d'entre eux, apparemment cassé. Quelques distributeurs plus tard, nous avons nos bouteilles, nous avons nos sièges, nous avons les trains en face de nous, paysage intermédiaire parfait.

Nous sommes dans une gare, mais il est tôt et il n'y a personne, alors on peut bien en griller une. On en grille deux. Un vieil homme crasseux nous taxe et fait de nous ses « seigneurs ». Bien matinaux, les seigneurs. Une nénette tout aussi crasseuse nous lance un « bonne journée » en souriant. Il n'y a bien que les miséreux qui soient aimables, dans cette ville lumière. Nous repartons par le premier métro et le premier RER. Il est 6h.

Arrivés à Choisy, toujours avec nos trente kilos de valises, il se met à pleuvoir. De plus en plus fort. Il est tôt, nous sommes fatigués, et la pluie nous refroidit moral et os. C'est la dernière ligne droite, la plus difficile. Il est 6h30.

La maison a un goût de paradis, cette baraque qu'on a mis quatre heure à rejoindre. On pose, on jette nos boulets. On file l'un après l'autre sous une douche paradisiaque. L'eau chaude détend les muscles tendus, brûle les mains tuméfiées, rassemble le corps en pièce, réveille. Des muffins, des oeufs brouillés, voilà l'un des plus savoureux petits déjeuners de ma vie - so far. Il nous reste un aller-retour à faire, et l'appartement sera vide.

Il est 12h30. Nous avons récupéré un compagnon de route en route. Nous sommes trois, il fait jour, les rues s'agitent. Choiseul n'a plus de stores, Mr Blonde a disparu des murs, le bureau noir est vide. Choiseul est blanc et poussiéreux, comme je ne l'avais jamais vu. En quinze heures, nous aurons vidé le lieux mythique, la bulle de 19m² qui aura vu mes 19, mes 20 et mes 21 ans.

« C'est le vie ».


Tout ça, pour ça.