samedi 25 novembre 2006

Vive le claquos

Je ne supporte plus mon bloc de civilisation britannique. Trop de bons élèves, ça me rappelle le lycée Turgot. Chacun rivalise d'ingéniosité pour montrer combien il est sérieux. Sauf qu'en deuxième année de faculté, contrairement aux prépas, il faut aussi être cool. Faire preuve d'une décontraction à toute épreuve, dessiner des smileys sur le bout de ses Converses, et fumer sa clope comme Vincent Vega. Encore. Toujours. C'est élaboré, mais que veux-tu, tout le monde n'est pas étudiant dans le quartier latin, tout le monde n'a pas 20 ans.
Je me sens étrangère à ce décorum là. Je me sens étrangère à pas mal de choses, en fait. Chez les bourgeois turgotins, enfants de juristes, enfants de salauds. Sur une classe de 40 personnes, aucune n'a tiré son épingle du jeu. Je n'ai pas tiré la mienne. Aucun lien, aucune affection singulière. Rien. Chez les bobos sorbonnards, enfants de bobos, je n'ai jamais trouvé la décontraction nécessaire et suffisante pour intégrer un bobos-clan lambda. Je n'ai jamais vraiment fourni l'effort pour.
Les vrais amis, ceux qui supportent mes défauts et détestent mes ex, se comptent sur les phalanges d'un doigt. Mais il y en a quand même, c'est une bonne nouvelle. Ces vrais
amis là, je les remercie et je les admire. Parce que finalement, enfants de bobos ou enfants de salauds, vous n'y êtes pour rien, et le manque de sympathie est le lot de chacun. Je suis seulement et terriblement farouche. Avec le temps, j'apprécierai les castes et les intouchables. J'espère. Pour le moment, je conchie trop, je déteste trop, je m'ennuie trop.
Philippe Noiret est mort jeudi. La nouvelle m'a frappée. C'est idiot, je ne connaissais pas le bonhomme. Mais il appartenait à ces acteurs grands-pères, pour qui je m'étais emballée petite, devant le Vieux Fusil par exemple. Comme celle de Jacques Villeret, sa disparition file un coup de vieux à mes 20 ans.

Voilà, je compte les jours qui me sépare de la fin du semestre. Les jours qu'il me reste à côtoyer le bloc 4 des anglicistes. Foutu troisième semestre. Je m'en souviendrai. Intéressant, les mois derniers, mais sinistres. Et ruineux, avec pas moins de 300€ de bouquins. Certes, Hamlet n'a pas de prix, m'enfin, c'est un peu fort. Crésus a survécu.
Il reste exactement dix-huit jours. C'est peu. Tic, tac, tic, tac...

dimanche 19 novembre 2006

Le calme...

Mon frère avait accroché une fleur de tiaré à mon sac. Le temps du trajet, elle avait fané. Pourtant, elle sentait si fort que toute la ligne de métro en a profité. Une odeur de soleil, celle du monoï. Mon autre frère jouait au conducteur, lançant des "vroum" à tout va. Mon père était assis à côté de moi, toujours avec son air pensif. Arrivés à Gare de Lyon, la petite famille est partie. J'ai embrassé Maël et mes lèvres se sont enfoncées dans sa joue moelleuse et douce. Il m'a regardée avec effarement. "Tu viens pas avec nous ?". J'ai répondu par un sourire et un hochement de tête. Non, je ne suis pas le bonhomme, même si j'aimerais être dans le TGV pour Valences avec lui, avec eux. Moi, je continue jusqu'à Pyramides, et je rentre seule à Choiseul.

Je reste bien immobile dans l'ascenseur capricieux. Je déballe mes affaires, y compris toute la bouffe du week-end. Le frigo se rempli par magie les dimanches soirs. J'ouvre la fenêtre, j'allume une éternelle cigarette et je tombe sur le cul. Une fois encore, le ciel est beau. Il est violet, vire au mauve. Les nuages sont pourpres et les bâtiments quadrillés par l'ombre du crépuscule. Je cherche dans la hâte mon appareil photo pour capturer ce énième passage éphémère. Raté. L'appareil est introuvable. Je me demande même si je ne l'ai pas égaré. Une pensée sage me dit d'ouvrir les mirettes et de profiter. J'oublie d'immortaliser l'instant.
Pendant que les All Blacks écrasaient la France, une soirée s'im
provisait au Cour Saint-Emilion. Trois cafés crème, un chocolat chaud et des crêpes au sucre plus tard, les estomacs criaient encore famine et souffraient du froid. Nous les avons réchauffés avec une viande saignante, des Martini, et un déluge de mots. Ma panse était prête à exploser, mais il fallait encore fournir un effort. Sous la pluie. Le lendemain, je me lèvais tôt, avant 11h, et j'allais embrasser qui de droit, lui sourire et lui dire combien je l'aime. Je n'aime jamais tant les cafés crème qu'en plein hiver. Quand il caille, que les mains sont congelées et les doigts prêts à tomber.
Et le temps d'écrire ça, mon dîner a cramé.

jeudi 16 novembre 2006

La suite

Une voix anonyme me demande une suite. Alors sans plus attendre, je vole un peu de mon temps si précieux, et m'empresse de répondre à ce délicieux cri de désespoir.
Parfois, n'ayant absolument rien à dire, je n'écris pas. D'autres fois, mon dessèchement verbal s'explique p
ar la complexité des événements, tout à fait indescriptibles. Ce soir, mes phrases seront longues et lourdes. On ne se refait pas, même après un bon mois sans prendre la plume. Il faudra que mon anonyme soit attentif et concentré.
Mes désastreuses aventures sont nombreuses, et désastreuses. Je suis touchée par le mal de l'étudiant moyen, qui ne prend pas d'avance et procrastine sans cesse. Une armée de dissertations, exposés, examens ou traductions me déclare la guerre, et l'angoisse coule bellement dans mes veines. Mon sang doit être plus rouge que d'habitude. Ca pulse jour et nuit, c'est infernal. J
e travaille des heures, mais j'affronte un colosse et le temps me manque. Il me tarde d'être à décembre, quand le semestre sera terminé. Comme toujours, j'organiserai des séances de cinéma par dizaines. Viendra qui voudra, pourra. Il y en aura pour tout les goûts, de Saw III à Perhaps Love, de Borat, ce génie ridicule, à Coeurs... Et il y aura Babel, certainement plusieurs fois.
Quelques courses de Noël, et le tour sera joué pour boucler 2006. Je n'ajouterai pas "en beauté". Mes mains sont chatouillées par le désir de faire le fameux bilan annuel ce soir. Mais les jeux ne sont pas encore faits, malheureuses.
Novembre s'est assombri dès l'aube. Mes joues ont rougi, caressées par une claque dans la gueule. Une mauvaise nouvelle a coupé la corde du stoïcisme qui m'assurait contre les chutes. J'ai tout maudi, puis j'ai pleuré. J'ai peut-être perdu quelques kilos d'eau. Mais les larmes sont une réponse épuisable et épuisante au boulet du chagrin. Fanée et fatiguée, je me suis endormie.
Aujourd'hui, je me suis rendue compte combien Choiseul va me manquer quand je le quitterai, un jour.
Et je me suis souvenue de la première chanson qui a vraiment compté. Celle qui a marqué le début d'une quête effrénée de la mélodie parfaite. Je devais avoir 14 ans. Finalement, cette chanson parfaite, je la trouve tous les jours, ou presque. En ce moment, les murs tremblent et Schubert est proscrit
. Puisque tout me manque, le temps comme les gens.

En comptant bien, il me reste l'espoir, la patience, et les Scissor Sisters.