samedi 26 janvier 2008

Into the Wild


Il est rare que le premier film que je vois dans l'année soit mémorable. Il est rare que de l'actuel, du factuel que je vis et que je vois, naisse du virtuel et un souvenir agréable, qui trouve une petite place indécrottable dans ma mémoire.


Il faut souvent attendre et exploiter les douze mois pour trouver les petites perles. Cette année, l'huître s'est ouverte plutôt tôt. J'ai commencé par le dernier bébé de Sean Penn, Into the Wild. J'ai commencé fort.


D'un point de vue personnel, ce film est arrivé à point nommé : en pleine période de partiels, en cours alors que j'aurais dû être à Madrid, en pleines études, je pouvais disparaître à mon tour de la société durant deux heures.


Je ne suis pas une amoureuse de la nature, et nombre de mes amis sauraient aller dans mon sens quand je dis que je suis une citadine. Aux bêtes féroces, aux odeurs de fumier, aux orties, à la boue, je préfère les hommes, le fumet du métro, les clopes et le macadam. En bonne citadine, je ne m'émerveille pas, je m'énerve. En bonne citadine, un film qui me plonge en pleine nature et vomit la ville saura rapidement m'agacer.




On voit un tas de films moralisateurs depuis quelques temps. Contre la guerre, contre la violence, pour l'écologie, « pour la planète » voire contre les hommes. Mais le message, aussi louable soit-il, prend souvent le pas sur la beauté de l'art du cinéma. Il devient de ce fait trop gros, trop provocateur, moins percutant.


Le dernier trappeur m'agace, la marche de l'empereur m'ennuie, parce qu'un message d'amour à la nature doit se faire avec un semblant d'humanité : avec de l'amour, de la finesse, du lien. Je n'y vois que du reproche et de la contemplation, dont découlent une insoluble culpabilité. Je n'aime pas que l'on me lise un texte alors que je sais lire, et je connais les vérités dérangeantes, comme on les connaît tous. Je veux autre chose, quelque chose qui me touche, qui m'atteigne, qui m'affecte, du haut de mes talons aiguilles qui claquent sur le béton.


Into the Wild est un très bon film. Tout juste diplômé, un jeune homme décide de disparaître des villes et de vivre sans le sou, en pleine nature. On apprend progressivement les raisons qui ont pu le pousser à faire un tel choix, mais cela importe peu. La voix de sa soeur importe peu, elle pique parfois même un peu. Au-delà de la beauté des paysages, la quête d'Alex Supertramp semble d'abord étrange, lointaine, certainement très belle mais inimaginable. Puis, à mesure que les minutes s'écoulent, je suis saisie, comme beaucoup, d'un drôle de sentiment de plénitude et de douleur.


Ce n'est qu'un film, mais il me fredonne des vérités séduisantes et dérangeantes, dont j'écoute depuis trois jours la plus simple et de ce fait la plus belle : I think I need to find a bigger place, when you have more than you think, you need more space. C'est ballot, c'est tout con, c'est l'art d'enfoncer une porte ouverte sur le vide. Je pense à mon tour combien il serait bon de vivre dans un espace plus vaste et plus dense que moi-même. Tout ce que je pense que je pense, tout ce qui bourdonne et qui gronde, tout ce qui ne saurait s'exprimer au milieu des Champs Elysées. La nature devient un personnage fascinant, attirant et répugnant. Elle pète à la gueule de la citadine auto-satisfaite.



Enfin je trouve du tangible, du sens à un « message ». Loin des hommes, la nature apporte à Alex deux valeurs philosophiques inestimables : l'humilité et la liberté.


Je craignais que le personnage ne se transforme en misanthrope. Sa fuite est infernale. J'avais peur que ne soient confondues l'humanité et la société, souvent agglutinées en une entité diabolique vouée au purgatoire. Il n'en est rien, et la dernière trouvaille d'Alex le globe-trotter philosophe, d'ajouter : Happiness only real when shared. Il m'a eue, j'avais les yeux humides de colère.


Autre fait rare au cinéma : l'humour. Tous les films, documentaires et photos à portée « sauvons la planète-nous sommes des parasites coupables-société tu m'auras pas » que j'ai vu manquent gravement d'auto-dérision. Pourtant, elle permet de ne pas se perdre dans une contemplation et un émerveillement insipides et plats. La conversation entre Emile Hirsch et Vince Vaughn beurrés, qui servent le mot « society » à toutes les sauces, qui le grognent comme des ours et le mugissent comme des fauves, est désopilante et mérite l'attention.


Même si parfois un brin chiadé, Into the Wild m'a dit comme ça que la nature n'est pas une belle victime et qu'elle ne dépend pas des caprices des hommes. Quitte à choisir, c'est l'inverse.

Elle montre aux hommes ce qu'elle peut pour eux et Sean Penn le lui rend bien. Si je ne me sens pas de faire comme le jeune idéaliste Chris McCandless, je remercie le cinéma de m'en donner le sublime aperçu.



6 commentaires:

Anonyme a dit…

Heureuse d'avoir partagé ce petit moment "d'échappée" avec toi...A bientôt poulette

Delenda Lavingtaine a dit…

Heureuse aussi choupette, on repart quand tu veux!

Moi a dit…

Bonjour =D

Je suis tombée par hasard sur ton blog, faisant une énième recherche sur ce film: Into The Wild. J'aime à penser que le titre lui-même relève de la poésie.

J'ai beaucoup apprécié ton article, et en effet, la scène où le papier de son livre s'imprègne de l'encre noir de son stylo pour faire face à cette terrible réalité, celle qu'il cherchait à fuir : "Happiness only real when shared". Ton expression est totalement appropriée ! : "j'avais les yeux humides de colère." C'est sans doute pour moi l'une des meilleurs scènes du film (j'allais dire "la meilleur" mais mon esprit refuse de couper un chef d'oeuvre de ce genre... ). L'autre scène avec Vince Vaughn est délicieuse, je suis contente de savoir qu'elle t'a aussi pincer l'esprit à en lacher un rire sincère, car dans la salle obscure, il me semblait n'entendre que mon pauvre rire qui a vite pris fin au vue de la non-réaction qui m'a mise dans l'embarras, je me suis dit : "suis-je idiote ? il ne fallait pas rire apparemment !" (le fait est que l'avis des autres ne devrait -et oui ne devrait- pas m'atteindre, après tout c'était une réaction honnête, pourquoi me poser ce genre de question ?...............).

L'obsession m'a poussé à retourner au cinéma, déguster cette merveille sur grand écran pour -assurément- la dernière fois de ma vie (mmh à quand le DVD ?), mais j'aurai au moins le privilège et la fierté de dire au monde : "Je l'ai vu, revu et je l'aime encore plus".

La BO est -enfin- entre mes mains, elle ne dure que "33 minutes" à ma plus grande déception, mais la voix d'Eddie Vedder est parfaite !

A plus, peut-être.

CC

Delenda Lavingtaine a dit…

@ toi : C'est vrai que pour un premier jet, ce film est surprenant de justesse. Même si je préfère les moments de solitude de Supertramp à ses rencontres parfois un peu stéréotypées, je reste d'accord pour dire que c'est un film de cinéma, et suis bien heureuse que tu sois tombée par hasard par ici. Ça fait toujours plaisir d'avoir un autre avis que le sien ! Merci.
A bientôt, toi.

Moi a dit…

"Moi" ? pourquoi ai-je mis ça ?? (...)

T'ai-je parlé du livre ?! Il est extrêmement interessant !... La complexité de la personnalité de Chris. J. McCandless est captivante/intriguante ! Et puis retrouver les passages du film c'est génial !!! De plus à chaque nouveau chapitre, il y a de nombreuses citations des auteurs qu'il appréciait ou en rapport avec sa vie/...Je te le conseille en version originale (tjrs plus sympa!)et puis j'ai l'impression que l'anglais n'est pas très compliqué il m'a parut extrêmement clair !
Et puis que de détails en plus! tellement de témoignages ! (surtout concernant Ron Franz = émouvant! ...).

C'est parfois révoltant... la vie... le destin.

Tu as raison pour les rencontres un peu "stéréotypées", je ne l'avais jamais perçu sous cet angle (uuumh un peu aveugle sans doute....-_-... ^^).

Vivement le DVD (=D)!!!!

Bonne soirée.
CC

Anonyme a dit…

Je mexcuse des faute d'ecriture qui vont suivre, je veu pas faire d'effort, dsl.
avant de voir ce film, je savais deja par ma propre reflexion, que le bonheur necessite l'autre.
Et qd il annonce que le bohneur est partt, ke ce n'etait kune kestion détat desprit, je suis tomber dénu.
enfin qd g vu "Happiness only real when shared", je me suis reconforté (ouf !)
Je trouve stupide ce jeune homme de vivre au dépend des livres. Sa vie bascule, au chapitre "sagesse" qd il decide de copier l'auteur et de partir. finalement il est coincé et meurt. bienfait ! non lol
Ns somme ts comme lui, sauf ke :
il a choisit l'application concrete-mettre la main ds le feu pour voir que sa brule-pour atteindre la sagesse.mwa pa assez courageu !
il a chercher la bonheur, il a grandit en lui comme un enfant (a travers d chapitre, enfance, adolescence, age adulte...)pour enfin comprendre que seul, il serait maleureu. Qd le vieille homme lui parla de dieu, il ne s'interessa pas et pourtt. Dieu dit ds le livre de la genese "il n'est pas bon pour l'homme de rester seul"
sa aurai repondu a cette question du boneur et maintenu en vie.
enfin bref, tres beau film, g pleurer, oui je suis faible mais pas grave. réagisser sur mon hotmail ++
julie.034@hotmail.fr